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La dérive sécuritaire du maire de St-Etienne Thiollière mise en cause au conseil municipal.

mardi 17 octobre 2006, par Roger Dubien

Au conseil municipal du lundi 2 octobre, j’avais fait inscrire en question d’actualité ajoutée à l’ordre du jour :  "Les menaces pour les libertés et la sûreté des stéphanois créées par la politique sécuritaire menée à St-Etienne."  
N’ayant pas encore le pv de cette intervention et de la réponse du maire qui a suivi - intervention difficile parce que j’ai été interrompu plusieurs fois par le maire et par les sarcasmes puis le brouhaha des élus de droite et d’extrême droite - , voici la trame de ce que j’ai dit ou essayé de dire.

Roger Dubien
conseiller municipal - Réseaux citoyens de St-Etienne

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J’ai déjà eu plusieurs fois l’occasion de mettre en cause la dérive sécuritaire en cours à St-Etienne depuis plusieurs années. J’ai également fait la comparaison entre l’évolution du budget municipal affecté à l’Education et le budget affecté à la Police municipale et à la vidéo-surveillance.

J’ai bien conscience que cette dérive n’est pas uniquement stéphanoise. Les immixions directes récentes du ministre de l’intérieur/candidat dans le fonctionnement de la Justice en sont un nouvel épisode. Tout ceci s’ajoute au déferlement de lois et de règlements sécuritaires, y compris contre les enfants.

Cette policiarisation de la vie sociale accompagne le démantèlement néo-libéral de l’Etat social, de tout ce qui est protections collectives. Elle prend aussi la forme de tentatives de criminalisation de l’action collective, comme on le voit contre les faucheurs d’OGM - par exemple dans la Loire, 3 personnes sont condamnées pour avoir fauché un champ de maïs OGM, qui a ensuite été déclaré illégal par la Justice..., ou par exemple quand des paysans qui agissent contre la baisse totalement injustifiée du prix du lait sont traînés devant les tribunaux, ou quand quelqu’un est poursuivi pour avoir diffusé la recette du purin d’orties....
La dérive sécuritaire est l’un des moyens du contrôle politique. M Sarkozy a décidé semble-t-il d’essayer de gagner comme ça la présidentielle.

Dans les quartiers et notamment à St-Etienne, cette dérive prend la forme d’un harcèlement permanent d’une partie de la jeunesse.
J’en avais parlé ici notamment lors des "révoltes urbaines" de novembre 2005.
Il me semble que ce harcèlement s’accentue et je me demande si certains ne font pas le calcul qu’une nouvelle explosion arrangerait les affaires du candidat de la droite à la présidentielle. Je veux mettre en garde contre les risques graves que porte cette dérive

Cette dérive est dangereuse pour la liberté et la sûreté des stéphanois. Parce que dans cette ambiance qui devient de plus en plus pesante, tout est fait pour justifier cette dérive, et le gaspillage d’argent qui va avec. Et alors malheur à celui qui peut se trouver au mauvais endroit au mauvais moment, par exemple si - alors que le coupable d’une infraction est recherché - les caméras vidéo font apparaître sa présence dans le secteur à ce moment là . Quand on ne veut pas qu’elles masquent évidemment, comme on l’a vu quand le jeune Ichem a été frappé par un policier au centre ville il y a bientôt 1 an et demi ; on se souvient que là, la bande vidéo a été introuvable...

Donc, je mets en cause la pression politique qui est organisée à St-Etienne contre les libertés. Particulièrement par vous M. Thiollière.

Je vais prendre un seul exemple, pour ne pas être long : l’affaire des incendies de voitures et de magasins qui ont eu lieu dans la nuit du 19 au 20 août.

à ce moment de mon intervention, les sarcasmes ont cessé, le maire s’est levé, et ensuite, à plusieurs reprises, ça a été le brouhaha

Au moins 11 voitures ont été brûlées et également 3 magasins, rue du Grand Gonnet, place Jacquard, rue Palluat de Besset, rue Antoine Roche devant le collège et rue Vital Descos à Chavassieux.
Quelques jours après, 2 jeunes ont été arrêtés, et les déclarations que vous avez faites à la presse sont sans ambiguité.
Vous avez salué une enquête "menée avec rapidité et efficacité". Vous avez "félicité les forces de police qui ont démontré une nouvelle fois leur grand professionnalisme" et immédiatement, vous avez aussi souligné "l’aide apportée dans leur travail par les images de la vidéosurveillance municipale, preuve s’il en était besoin de son utilité."...

C’est aller vite en besogne tout cela, et c’est très grave, surtout quand il s’agit de la liberté et de la vie de jeunes. Et de leurs familles.

Car beaucoup de choses portent à croire - et c’est ma conviction - que ce ne sont pas les deux jeunes arrêtés, et qui sont encore en prison 5 semaines après leur arrestation, qui ont brûlé ces voitures.
Tout simplement parce sur ce n’est matériellement pas possible.
Il semble bien que leur seul tort est d’avoir été filmés dans le quartier par une caméra de vidéo-surveillance municipale alors qu’il fallait trouver vite des coupables.
Je sais bien qu’au bout de quelques jours d’interrogatoires, l’un des deux jeunes a accusé l’autre, qui se prénomme Fatah, d’être l’auteur des incendies. Pourquoi ? ce sera à voir. Mais depuis, il est revenu semble-t-il sur cette accusation. Et Fatah a toujours dit qu’il n’avait rien à voir avec cette histoire.

Je connais sa famille et que nous avons regardé les choses d’un peu près, l’accusation ne repose sur rien de sérieux et ne tient pas debout.
Fatah n’est pas un jeune à cramer des voitures.
Il a un emploi, depuis des années, pour lequel il commence tous les matins vers 4h30, il a un appartement, il a une amie avec laquelle il vit depuis 4 ans. Il se préparait à partir 8 jours en vacances en Grèce le 4 septembre, billets d’avions achetés...
Matériellement, cela ne tient guère debout non plus. Ce n’est pas possible de brûler 11 voitures, sans rien, avec seulement un briquet, pas de matériau inflammable, rien pour casser les vitres, même pas un couteau pour déchiqueter des sièges et fabriquer du matériau difficilement inflammable, et tout cela en 20 minutes chrono, en 5 endroits différents, entre la rue du Grand Gonnet et Chavassieux, à pied. C’est matériellement impossible.
20 mn chrono, parce que c’est le temps qui sépare les différents appels aux pompiers, entre 2h37 Grand Gonnet et 2h57 Chavassieux.
Il y a bien d’autres incohérences dans cette affaire. Qui a tout l’air d’une enquête bâclée, sous pression politique. Il fallait un coupable, mauvaise pioche.

Mauvaise pioche à commencer bien sûr pour ces jeunes et leurs familles, pour Fatha notamment, dont la vie risque d’être foutue en l’air et qui est toujours en prison depuis 5 semaines.

Pour ce qui me concerne, je veux protester aujourd’hui vigoureusement contre l’ambiance et la politique sécuritaires qui est en train de gangrener notre ville. C’est un danger grave pour la liberté et la sûreté des stéphanois. Et cela ne peut que déboucher sur des drames si cela continue.