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L’été des faucheurs volontaires d’OGM

dimanche 2 septembre 2007

 Assemblée générale en Bretagne en juillet, occupation du port de St-Nazaire, inspections citoyennes et fauchages dans les départements, action nationale chez Monsanto à Verdun sur Garonne les 25 et 26 août... Les faucheurs agissent pour obtenir un moratoire immédiat sur les cultures d’OGM en France. S’il n’y a pas de moratoire, le “Grenelle de l’environnement” ne sera qu’une opération de communication, d’écologie de façade... 

Si les faucheurs volontaires n’existaient pas, on nous aurait imposé les OGM sans même que nous nous en rendions compte.
Près de 500 personnes se sont retrouvées le week-end des 21 et 22 juillet à Riec sur Bellon (Finistère) pour la 4ème assemblée générale des Faucheurs Volontaires d’OGM. Une Assemblée ouverte par José Bové, pour faire le point du combat contre la dissémination des OGM et préparer les prochaines actions, alors que nous sommes dans une période décisive (21 000 hectares de maïs Monsanto 810 semés en France en 2007, nombreux procès contre les faucheurs, tenue du “Grenelle de l’environnement” fin octobre...)
Une trentaine de personnes de Rhône-Alpes ont participé à cette assemblée.

Les faucheurs - qui sont aujourd’hui 6700 - sont nés suite à l’appel lancé en août 2003 au Larzac par Jean-Baptiste Libouban, aux côtés de José Bové. Les premiers fauchages de cultures transgéniques avaient commencé avec la Confédération paysanne en 1997 (du colza transgénique semé par Monsanto, dans l’Isère, fauchage qui fut suivi du procès des “3 de St-Georges”). D’autres que les paysans voulaient aussi s’impliquer... Il est certain que sans ce mouvement des faucheurs, la prise de conscience ne serait pas ce qu’elle est aujourd’hui. Les enquêtes d’opinion montrent toutes qu’environ 85% des gens - et 60% des paysans - sont maintenant opposés à la dissémination des OGM. 


La spécificité des faucheurs, c’est la désobéissance civique, le passage aux actes.

Les faucheurs ne sont pas seuls à lutter contre les OGM. Beaucoup d’autres personnes et organisations prennent aussi position.
La spécificité des faucheurs, c’est le passage à la désobéissance civique, le passage aux actes. Parce que légitimité et légalité, parfois ça fait deux. Quand toutes les voies légales sont bouchées, sans possibilité de décision démocratique après débat, les faucheurs sont des citoyens qui ont décidé de désobéir, à visage découvert, de façon non violente, pour interpeller la société, “le politique”, provoquer le débat, obtenir la création de nouvelles règles de droit.
“Quand tous les moyens légaux ont été utilisés, et qu’on se trouve dans un état de nécessité, reste la désobéissance civique, l’action par soi-même”, dit Jean-Baptiste Libouban. Les faucheurs sont le grain de sable qui enraye la machine.

Les actions des faucheurs ont donc permis qu’en France les choses n’aient pas pu se passer dans le silence. Mais les semenciers - c’est à dire les grands groupes agro-industriels US (comme Monsanto) ou français (comme Limagrain), et des politiques qui les servent, continuent le forcing pour imposer les OGM. C’est que les enjeux financiers et de domination du monde sont tout simplement inimaginables. Il s’agit ni plus ni moins du contrôle de l’alimentation sur la Terre. C’est encore plus “gros” que le marché du pétrole ou le commerce des armes. Les dangers pour la santé et pour l’avenir de la planète sont eux aussi de cette ampleur.

En France, 2007 est une année décisive : alors que des essais continuent, et que sont développées des productions de semences OGM, ce sont environ 21 000 hectares de maïs OGM Monsanto 810 qui ont été semés en cultures “commerciales” dans 40 départements. (Voir)
On voit bien l’objectif : il s’agit de rendre irréversible la contamination, de décourager tout le monde en créant une situation où l’on penserait que ce n’est plus la peine de résister. En plus, l’élection de Sarkozy conforte les agro-industriels : il avait refusé de s’engager sur un moratoire... Sauf que l’avenir de l’humanité et de la planète est maintenant au coeur des discussions. Qu’un “Grenelle de l’environnement” a été annoncé pour octobre, et que les OGM seront au coeur du débat, et même la ligne de partage qui permettra de juger du sérieux de l’affaire.

En Europe, le refus des OGM s’étend. De plus en plus de pays décident un moratoire : Autriche, Grèce, Hongrie, Italie, Suisse, Pologne. L’Irlande se prépare à interdire les OGM. L’Allemagne vient de suspendre les semences de maïs Mon 810... La tournure que prendront les choses en France va compter.

A Riec sur Bellon, on a fait le point des actions et procès en cours. Un rouleau compresseur de procès (200 faucheurs traînés devant les tribunaux, 80 condamnés à des peines de prison ou d’amendes et de dommages et intérêts, le total des condamnations est de l’ordre de 300 000 euros !...) qui ne parvient pas à les décourager. Jusque là, les tribunaux, qui par deux fois ont pourtant donné raison aux faucheurs en reconnaissant “l’état de nécessité” (lors des jugements de relaxe d’Orléans et de Versailles, mais ces deux décisions ont été cassées en appel) laissent faire les contaminations...
François Roux, avocat des faucheurs, reconnaît que la période est difficile parce que la répression est lourde. Les condamnations tombent, les amendes sont lourdes - les faucheurs y font face solidairement - et les décisions favorables ont été cassées. N’empêche qu’elles existent quand même et comptent pour la suite. Elles ont reconnu l’état de nécessité, qui est la reconnaissance juridique de la désobéissance civique, au fond. C’est un combat de longue durée, les faucheurs le savent.
José Bové pense que si cela devient plus tendu, c’est parce qu’on s’approche du coeur du problème.

Multiplier les fauchages symboliques... Pour ce qui est des fauchages, compte tenu de l’ampleur des surfaces semées d’OGM, les données du problème changent un peu. Dans des départements avec des milliers d’hectares de cultures commerciales OGM, faucher n’a plus de sens. C’est pourquoi décision a été prise de multiplier les actions symboliques, comme le fauchage d’un épi par personne début juillet à Toulouse, avec tests sur la place du Capitole.
Par contre pour ce qui est des essais et des cultures de semences, le problème est différent. Là, ce sont les OGM de demain qui sont préparés et il est très important d’obtenir leur neutralisation...




23 juillet : occupation du port de Saint-Nazaire pour dénoncer les importations de Soja OGM pour l’alimentation animale




“Travaux pratiques” dès le lendemain de l’AG des faucheurs : plus de 150 personnes ont occupé lundi 23 juillet le terminal agro-alimentaire du port de St-Nazaire. _ C’est là qu’arrivent chaque année d’Amérique du Sud, notamment du Brésil, 2 millions de tonnes de soja dont les 3/4 au moins sont OGM (sur 5 millions importées au total) pour l’alimentation animale.
Alors qu’un nouveau bateau de 48 000 tonnes de soja OGM était attendu, les militants ont empêché le chargement des camions qui se déroule en continu, de l’ordre de 100 camions par jour (à 27 tonnes voire 30 tonnes par camion...), qui partent vers les revendeurs et les élevages dans toute la France et au delà. Par exemple pour nourrir les poulets du groupe Doux... Une partie de ce soja est stockée par la société Sea Invest. Une partie est produite, importée et utilisée par la multinationale US de produits agricoles Cargill.
Des prélèvements de Soja ont été faits, pour tests.
Sur place, on a eu la confirmation de visu de l’absence de séparation étanche des productions OGM et non OGM dans le transport, le déchargement, le stockage. Confirmation aussi que celles et ceux qui travaillent dans cette chaîne n’ont pas une information objective sur les conséquences sanitaires, environnementales, socio-économiques des OGM.
Beaucoup de discussions pendant cette journée, avec les chauffeurs des camions comme avec les personnels du port...
Les faucheurs ont levé le camp tard en soirée après que leur demande d’une rencontre avec le gouvernement ait été acceptée. Une délégation des faucheurs a donc été reçue le 31 juillet par la secrétaire d’Etat N. Kosciusko-Morizet. La délégation a exigé un moratoire immédiat sur les cultures, essais et ventes d’OGM en France. Aucune réponse satisfaisante n’a été donnée sur le suivi environnemental (biovigilance) des cultures de maïs GM actuelles (les 20 000 ha) et leur traçabilité. Un constat de carences qui “justifie d’autant plus la nécessité d’une destruction préventive par l’Etat des parcelles ensemencées dans le but d’éviter une contamination aux différents stades de la filière : production, récolte, transport, stockage, commercialisation, consommation.” La délégation a aussi demandé la mise en place d’un suivi sanitaire pour les personnels travaillant actuellement dans la filière OGM.




Repérer les parcelles, organiser la mobilisation citoyenne, traquer la pollution aux OGM

Durant l’été, des inspections citoyennes et des tests ont eu lieu dans de nombreux départements pour repérer les parcelles de Mon810 notamment, dont la superficie a été publiée par canton seulement. Trouver les champs, exiger leur neutralisation...
Dans cet effort, les apiculteurs jouent un rôle important : les OGM sont un danger mortel pour leur profession. Car, si les abeilles ne font pas de miel avec le maïs, elles vont dans les champs de maïs pour récolter du pollen. Or le pollen est directement utilisé pour la consommation humaine, et on en trouve aussi dans le couvin, d’où sortent les jeunes abeilles. Et d’ailleurs, on trouve aussi du pollen dans le miel - c’est même comme cela que l’on peut savoir de quel miel il s’agit ! - et donc du pollen de maïs OGM.
Les apiculteurs se mobilisent donc partout pour exiger de connaître l’emplacement précis des cultures OGM - ce qui leur est refusé !! - pour essayer de détecter les champs, et pour mettre en évidence les contaminations. Des plaintes sont déposées.
Le récent jugement du Tribunal de Marmande, en juin, est incroyable : l’apiculteur Maurice Coudoin qui avait saisi la justice après avoir apporté la preuve de la contamination de ses ruches par le transgéniculteur Ménara a été débouté : le juge lui a dit d’aller mettre ses ruches ailleurs, qu’il les avaient installées volontairement à proximité d’un champ OGM pour prouver la contamination, qu’il avait volontairement “créé le préjudice” ! Au passage, c’est d’ailleurs une reconnaissance de la contamination, et un feu vert pour qu’elle continue !
Mais alors, pourquoi refuser de dire aux apiculteurs où sont les parcelles OGM ? Les apiculteurs vont interpeller les Directions départementales de l’Agriculture - des “sommations interpellatives” sont faites, par huissier auprès des DDA, pour savoir s’ils peuvent mettre leur ruche à tel ou tel endroit, puisque la localisation des champs OGM leur est refusée...
Et que dira la justice lors de plaintes d’apiculteurs contaminés et qui ne savaient pas où sont les parcelles OGM ?
Les apiculteurs, et les agriculteurs bio, qui ne pourront plus travailler si le coup de force des pro-OGM réussit, vont aussi multiplier les tests pour repérer les contaminations. N’est-ce pas pour cela que le champ de maïs d’un agriculteur bio a été détruit avec des produits chimiques fin juillet dans les Pyrénées Atlantiques :
pour empêcher d’apporter la preuve de la contamination par les OGM. Entourée par des parcelles OGM, ce champ participait à une expérimentation visant à mesurer la pollinisation du maïs bio par le maïs transgénique... On allait là pouvoir saisir la justice, qui aurait alors dû faire une expertise et mettre en évidence la pollution.
Jusqu’à la récolte du maïs en octobre, on s’efforcera aussi d’établir le plus de preuves possibles des pollutions (dans les champs, sur les routes, dans les lieux de stockage...).
Décision est prise aussi par les faucheurs de demander plus directement des engagements et des comptes aux élus.

L’action nationale à Verdun sur Garonne les 25 et 26 août...

Environ 300 faucheurs se sont rassemblés à Verdun sur Garonne ( Tarn et Garonne) ces 25 et 26 août. Ils se sont retrouvés face à 200 pro-ogm, une force organisée par les semenciers (le manitou des OGM chez Limagrain Topan était là, alors que l’action dénonçait notamment le maïs 810 de Monsanto et visait un siège de Monsanto !). 200 gendarmes mobiles qui ont dû faire usage de leur équipement face aux pro-ogm venus pour en découdre. Apparemment, les transgéniculteurs ne portent pas le gène de la non-violence...
Des maïs transgéniques fauchés dans l’après-midi ont été déposés derrière le portail de Monsanto, gardé par les gendarmes mobiles.
Ce rassemblement a permis aussi de faire le point de la situation et de toutes les actions menées en France, de réaffirmer l’exigence du moratoire, sans lequel le Grenelle de l’environnement ne serait que du pipeau. Alors que Borloo vient d’annoncer une loi sur les OGM, les faucheurs sont catégoriques : si loi il y a, elle doit garantir qu’en France on pourra produire sans OGM et consommer sans OGM. Et il est prouvé qu’il n’y a pas de coexistence possible entre les OGM et les non OGM dans la nature. Ce qu’il faut, c’est c’est l’interdiction des cultures d’OGM en plein champ.

Dans les prochaines semaines, les initiatives vont se multiplier
Le 13 septembre par exemple a lieu à Montpellier le procès en appel de deux directeurs d’une filiale de Monsanto condamnés fin 2006 pour importation frauduleuse et vente de semences contaminées OGM en 1999 (voir : Du champ à l’assiette : pas d’OGM !)

Les 15 et 16 septembre seront deux journées d’actions décentralisées pour exiger le moratoire.
Les 2èmes “états généraux du moratoire” auront lieu les 13 et 14 octobre à Paris. Les premiers, qui avaient lancé l’appel pour le moratoire, avaient eu lieu à l’occasion du procès d’Orléans en 2006.

 Pour s’informer :   

http://www.monde-solidaire.org

http://www.infogm.org

Et pour Rhône-Alpes : resogm

Et le blog du Collectif anti-OGM 07

Le site de la Confédération paysanne

2 livres utiles pour comprendre la question des OGM...

- “Ces OGM qui changent le monde” de Gilles-Eric Séralini, chercheur, par ailleurs membre de la Commission du Génie Biomoléculaire.
Flammarion - 9 euros.
Un livre qui explique clairement ce que sont les OGM, comporte une brève histoire des OGM et un glossaire.

- "La guerre secrète des OGM", de Hervé Kempf. Journaliste scientifique et écrivain, Hervé Kempf couvre pour le journal Le Monde les questions de biotechnologie et d’écologie.
Enquête et récit. 9 euros. Collection "Points sciences"