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Familles et 41 enfants Rroms de St-Etienne.

Avec M. Thiollière, le père Noël est un huissier

dimanche 23 décembre 2007

Jeudi après-midi, les familles Rroms de Montplaisir ont reçu la visite d’un huissier, alors que trois jours avant, le Maire avait enfin fait rétablir le chauffage dans les locaux de l’ex-école maternelle, chauffage coupé depuis le 27 septembre : avec tous ces discours du Préfet et du gouvernement sur l’aide d’urgence aux sans abris, il fallait bien faire quelque chose. N’importe comment, d’ailleurs : les canalisations fermées étaient gelées, une partie a explosé. Pas vraiment de chauffage, donc, mais par contre des inondations et pas d’eau dans les toilettes.
L’huissier a apporté aux familles Rroms installés dans les bâtiments des ex-écoles de Montplaisir, 34 rue de Terrenoire, le cadeau de noël du maire : un « Commandement de quitter les lieux », qui concerne toutes les familles, celles hébergées dans l’ex-école maternelle comme celles hébergées dans l’ex école primaire.
Les 108 personnes du site devaient partir au plus tard le 22 décembre, c’est-à-dire qu’elles avaient 48 h pour dégager. Passé ce délai « je me verrais contraint de procéder à votre expulsion, et à celle de tous occupants de votre chef, si nécessaire avec l’assistance de la Force Publique, d’un serrurier et d’un déménageur » est-il écrit dans cette carte de voeux.
Peu importe les températures glaciales du début de cette semaine, peu importe la période de la trêve hivernale pour les expulsions, peu importe le “plan grand froid” activé par la préfecture, peu importe, le maire de Saint Etienne expulse 108 personnes sans leur proposer une solution de rechange. ça en dit beaucoup plus que de longs discours sur les conceptions qui ont actuellement cours à la mairie de Saint Etienne.

Le préfet dans un communiqué du 15 décembre avait pourtant appelé la population à "à faire preuve d’une grande vigilance. Les services de police et de gendarmerie, les services de secours devront à l’occasion de leurs interventions accorder la plus grande attention au repérage de personnes pouvant se trouver en difficulté.
Toutefois, veiller aux plus fragiles d’entre nous est aussi un devoir citoyen. Il appartient à tous de transmettre aux personnes concernées des informations, de leur proposer conseils et soutien."

Il y a à Montplaisir 41 enfants dont un bébé de moins d’un mois et un autre de 5 mois, de nombreux enfants de moins de 2 ans, une femme enceinte de 8 mois, des handicapés.

Pourquoi cette décision maintenant ? Est-ce que certains pensent qu’un petit coup de xénophobie, ça ne pourrait pas faire de mal au baromètre électoral ? Surtout que mercredi la candidature de St-Etienne pour être capitale européenne de la culture en 2013 a été écartée. L’équipe du Maire ne perd donc pas de temps pour être en pointe dans le domaine de la culture comme dans celui de l’Europe, en chassant les familles et enfants Rroms pendant la période des fêtes.
Le commandement s’appuie sur une ordonnance rendue par le Président du tribunal de Grande Instance de Saint Etienne le 1er mars 2007. Mais cette ordonnance ne concerne que le bâtiment de l’école maternelle. Pour les familles installées dans l’ex-école primaire, c’est la mairie qui avait elle-même installé ces familles dans ce bâtiment, suite à leur expulsion du squat de la rue Béraud le 8 août 2007 lors d’une grosse opération policière...

Où en étions-nous ce samedi soir ?
Suivant ce commandement de quitter les lieux, les familles devaient partir au plus tard ce samedi 22 décembre, sans aucune proposition d’hébergement de rechange.
Devant l’impossibilité de joindre le moindre élu et responsable administratif, une très forte délégation de familles Rroms et de personnes solidaires est venue, vendredi matin 21 décembre, exprimer son indignation et demander des explications. Du coup le maire à du faire recevoir quelques personnes par le Directeur général.
Voici les explications qu’il a fournies au nom du maire de Saint Etienne :
D’abord confirmation de la demande de quitter les bâtiments de Montplaisir sous 48 heures et de l’engagement de la procédure en direction du préfet pour obtenir le concours des forces de police.
Les raisons avancées sont l’état sanitaire et les conditions de sécurité (au regard des branchements électriques) qui règneraient sur le site. La mairie a constitué depuis quelques temps un dossier a partir de photos avec constat d’huissier. Pour eux le site et les locaux sont dans un état de grande saleté avec des risques de maladies infectieuses et des risques d’incendie du fait des branchements électriques.
Le maire souhaite donc dégager sa responsabilité. Voilà pourquoi il aurait adressé ce commandement de quitter les lieux. D’après lui les familles ne peuvent plus vivre à Montplaisir donc il leur commande de partir. Sans doute que leur situation sanitaire et leur sécurité seront meilleures dans la rue ou dans des squats de fortune !
Toujours suivant les propos du directeur général, le dossier monté par la mairie va être transmis au Préfet en milieu de semaine prochaine. Lui seul peut prendre la décision d’utiliser les forces de police pour expulser les familles. Ainsi le maire dégage sa responsabilité en demandant au préfet d’intervenir.
Voilà pour les explications.

Il y a là une attitude non seulement inhumaine mais également extrêmement cynique. Le maire en dramatisant à l’extrême s’appuie sur des situations qu’il crée pour justifier ensuite l’expulsion. Rappelons que c’est lui qui a installé les familles dans le bâtiment de l’école primaire après les avoir expulsées de Béraud. Rappelons que c’est lui qui a fait couper l’électricité et le chauffage dans ce même bâtiment contraignant les familles, après plusieurs jours d’attente, à procéder à des branchements. Rappelons qu’en novembre il a fallu dix jours et une manifestation au conseil municipal pour remettre la benne à ordure, quinze jours pour déboucher les toilettes. Et il a fallu attendre des températures glaciales et le déclenchement du plan grand froid pour que l’ordre de remettre le chauffage soit donné. Aujourd’hui les services techniques ont coupé l’eau dans les WC et ne l’ont toujours pas remise.
Nous l’avons déjà dit, c’est bien le maire et le préfet (s’appuyant sur les consignes du gouvernement) qui mettent les familles en danger, qui les précarisent, qui détruisent une grande partie du travail du réseau de solidarité, qui rendent la vie des familles la plus invivable possible pour les faire partir. Ce jeudi 20 décembre alors que l’huissier amenait le commandement à quitter les lieux, des policiers ont distribué une nouvelle vague d’obligations à quitter le territoire.

Devant les questions pressantes de la délégation et la mobilisation déterminée de la matinée, le directeur général a tout de même du accepter de s’engager à donner les moyens pour un nettoyage du site. Il a accepté de mettre à disposition des sacs poubelles et des bennes à ordure. Si le site est nettoyé des employés municipaux pourront venir examiner les branchements électriques, a-t-il dit.
Mais il a refusé de joindre ces engagements au dossier qui va être transmis au préfet pour solliciter le concours des forces de police. Il a aussi refusé d’accepter que des discussions s’engagent pour examiner la mise en place de solutions d’hébergements relais durables et décentes, seule possibilité d’accueillir les familles roms dans des conditions de dignité. Les familles roms et le réseau de solidarité demandent l‘ouverture de telles discussions depuis plusieurs mois.

Ce samedi matin 22 décembre plusieurs bennes à ordures ont été installées sur le site et les sacs poubelles ont été distribués. Bien sûr immédiatement les familles ont procédé à un nettoyage. Normalement lundi matin 24 décembre un camion doit venir chercher les derniers sacs de détritus et de feuilles mortes.
Mais la menace d’expulsion est toujours là, puisque la procédure n’a pas été stoppée.

Avec les familles le réseau de solidarité va attaquer en justice le commandement de quitter les lieux. Le mercredi 26 décembre à 17h est organisée une conférence de presse dans les bâtiments de Montplaisir. Et le réseau de solidarité prépare un rassemblement original courant janvier pour demander notamment l’annulation de la procédure d’expulsion, un hébergement décent et durable pour les familles roms, l’arrêt de la distribution des obligations à quitter le territoire et un soutien pour toutes les familles Rroms, nouveaux membres de l’Union Européenne, qui souhaitent travailler et s’installer sur Saint Etienne.

Ce dimanche après-midi, les familles et le réseau de solidarité organisent une fête de Noël pour les enfants Rroms de Montplaisir. La semaine prochaine - pendant les vacances donc - les enfants sont inscrits pour les activités du centre social du quartier.

Messages

  • C’est chaque jour pire avec le maire de St Etienne. A-t-il vraiment cru lui-même que cette ville pouvait devenir capitale européenne de la culture ? je pense que c’était juste du baratin pour détourner l’attention des habitants des problèmes graves qu’ils vivent. Ce n’est pas - hélas ! - la première fois que le comportemnt de cette municipalité est odieux envers les plus pauvres et les plus rejetés. Prochaines élections ? peut-on espérer un changement ? Je ne vis pas à St Etienne mais je suis scandalisée par ce qu’il s’y passe derrière la peintue jaune et le design. J’ai eu l’occasion d’arriver à Châteaucreux venant de Clermont. Il faudrait que les responsables fassent ce trajet en train : ils verraient l’état de très nombreuses ruines dans lesquelles des gens habitent. C’est lamentable. La DDASS n’a-t-elle pas un rôle à jouer pour les personnes en danger à cause du froid ? Courage à tous ces malheureux trop éprouvés.

  • Une lettre de la FCPE au Maire, avec copie au Préfet

    La FCPE Loire soutient l’action du comité d’aide aux Roms
    La lettre adressée ce 24 décembre au Maire avec copie au Préfet

    « Depuis les évènements de Juillet 2006, notre conseil d’administration se tient informé de la situation de nos concitoyens Roms, dont certains habitent depuis longtemps Saint Etienne et dont les enfants sont scolarisés dans les écoles de la ville (41 à la dernière rentrée).
    Nous avions apprécié l’ouverture de dialogue pour rechercher des formes d’hébergement durable, mais votre décision (avec l’accord de Monsieur le Préfet) de tous les regrouper sur un seul site à Montplaisir a été pour nous source d’inquiétude : il était plus facile d’organiser la vie scolaire et sociale sur deux sites, et cela n’allait pas dans le sens d’un hébergement durable.
    Les tracasseries (et ou les pannes techniques ?) au quotidien envers cette population (administrative, enlèvement des containers poubelle, coupure de courant, d’eau, de chauffage) confirmaient nos craintes et rendaient la vie plus difficile notamment sur les plans hygiène et sécurité.
    Aujourd’hui, du fait de ces difficultés d’hygiène et de sécurité vous demandez aux résidents Roms, par commandement d’huissier, de quitter les lieux. Cette décision non assortie d’une proposition de relogement, nous semble inappropriée et inhumaine.
    Notre souhait est que vous reveniez sur votre dernière décision d’expulsion sans relogement et que vous vous employiez avec vos services et l’aide du réseau associatif à résoudre les difficultés actuelles. Le communiqué préfectoral du 15 décembre qui a appelé la population à "à faire preuve d’une grande vigilance. Les services de police et de gendarmerie, les services de secours devront à l’occasion de leurs interventions accorder la plus grande attention au repérage de personnes pouvant se trouver en difficulté. Toutefois, veiller aux plus fragiles d’entre nous est aussi un devoir citoyen. Il appartient à tous de transmettre aux personnes concernées des informations, de leur proposer conseils et soutien." , nous semble aller dans la bonne direction. »