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Rroms : la prise de position claire et nette des églises chrétiennes de la Loire.

jeudi 26 août 2010

Ce mardi 24 août, au cours d’une conférence de presse, la pasteur Magali Carlier de l’Eglise Réformée de France, le Père Louis Tronchon, vicaire épiscopal, et Mgr Dominique Lebrun, évèque de St-Etienne ont pris position au nom des églises chrétiennes de la Loire sur la chasse aux Rroms particulièrement forte à St-Etienne. Et ils n’ont pas utilisé la langue de bois.
Cette prise de position - soutenue aussi par l’Eglise orthodoxe grecque, l’Eglise arménienne, et l’Eglise protestante Baptiste de Saint-Etienne - concernera bien sûr les chrétiens. Mais elle intéresse aussi toute la société, car elle en appelle à des valeurs qui sont communes à beaucoup de monde.
On peut penser que les institutions chrétiennes sont d’autant plus légitimes à s’engager ainsi que les chrétiens sont nombreux à être engagés au quotidien, aux côtés d’autres citoyens, dans les associations et réseaux d’action et de solidarité de la région stéphanoise.
Voir par exemple le texte d’interpellation “Indignes d’avoir un logement ?” lancé fin juin par plusieurs associations catholiques de la région stéphanoise : A.C.O. (Action Catholique Ouvrière), CCFD Terre Solidaire, Secours Catholique, Délégation diocésaine aux questions sociales et à la Solidarité, Pastorale des migrants. Voir : http://www.droits-sociaux.fr

On peut lire le texte complet du communiqué des Eglises sur le site du diocèse : “Appel des Eglises chrétiennes de la Loire au sujet de la population Rrom séjournant sur Saint-Etienne Métropole” : http://www.diocese-saintetienne.fr
Les responsables des églises lancent en fait “quatre appels : 1- S’asseoir à la même table, 2- Connaître la culture Rrom, 3- Elaborer un projet politique, 4- Renoncer à la force.”

 Extraits :   

Les Rroms sont des êtres humains ; et ils sont européens. Guidés par ce simple constat et face aux événements récents, les responsables des Eglises chrétiennes de la Loire lancent un nouvel appel.
(...) Nous encourageons les Rroms à prendre en main leur avenir dans le respect des lois et coutumes des pays qui leur ont ouvert leur frontière. Nous soutenons les associations et les personnes qui, loyalement, les aident au quotidien, et revendiquent des solutions durables. Nous exprimons notre confiance dans les autorités politiques locales, gouvernementales et européennes pour chercher des chemins de justice et de paix, dans la compréhension de
leur culture propre.
Mais nous désapprouvons vigoureusement les actions spectaculaires de ces dernières semaines. Qu’apportent-elles sinon des nuits d’angoisses et des ressentiments ? Quelques dizaines de personnes sont reconduites à grand frais ; beaucoup reviendront et des milliers
d’autres continueront leur errance (...)
Nous désapprouvons l’apparente absence de projet européen pour prendre en compte, parmi d’autres, cette population minoritaire. Mais invoquer l’Europe sans faire de proposition n’est pas responsable. L’Europe ne se construit pas seulement d’en haut mais à partir de chaque nation, chaque région, chaque collectivité locale.
En 2012, c’est-à-dire demain, la liberté de circulation dans l’Union européenne ne pourra plus être restreinte. Que ferons-nous ?

Nous lançons quatre appels :

- 1. S’asseoir à la même table
Nous demandons aux intervenants de s’asseoir à la même table. Travailler ensemble est le meilleur moyen d’aboutir lorsque les situations sont
complexes. Pourquoi n’y aurait-il pas une commission permanente au niveau de la communauté d’agglomération Saint-Etienne Métropole, du département
de la Loire voire de la région Rhône-Alpes ?

- 2. Connaître la culture Rrom
Nous proposons de mieux identifier la manière dont la population Rrom gère sa vie communautaire. Cela permettra de mieux l’accueillir ; cela pourrait lui permettre d’avoir une expression collective et une représentation dans la vie des communes où elle séjourne.

- 3. Elaborer un projet politique
Nous souhaitons que les autorités politiques élaborent un projet pour la population Rrom. Celui-ci ne peut se limiter au respect de la loi et à la
protection de notre bien-être. La loi doit être respectée mais elle ne définit pas, à elle seule, ce qui est juste et bon.

- 4. Renoncer à la force
Nous invitons les pouvoirs publics à renoncer à l’emploi de la force lorsque des intérêts légitimes et évidents ne sont pas en jeu. C’est le cas lorsque des
personnes ont trouvé accueil sur des terrains communaux. Il appartient aux pouvoirs publics de mesurer que l’emploi de la force peut devenir une violence
faite aux faibles par les forts. Elle engendre alors colère ou désespoir (...)”.

Selon le compte-rendu de la conférence de presse fait par Le Progrès, l’évêque de St-Etienne n’a pas mâché ses mots. Il a parlé d’appel au « cessez-le-feu », estimé que les démantèlements spectaculaires de campements roms ne constituent qu’une « mascarade de solution »(...) « Nous désapprouvons vigoureusement les actions spectaculaires de ces dernières semaines (...) Nous invitons les pouvoirs publics à renoncer à l’emploi de la force, même lorsqu’elle apparaît sous le couvert de la loi ». Cet usage de la force peut rapidement devenir « une violence faite aux faibles par les forts ».
Les expulsions ne font que refléter l’incapacité des pouvoirs publics à résoudre le problème. « Il est tellement triste que des politiques fassent des amalgames aussi simplistes » (...) « Ce qui transparaît dans les récents propos du ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, ou du maire de Saint-Etienne, Maurice Vincent, c’est de l’impuissance »...

Parmi les propositions pour « chercher des chemins de justice et de paix » et tout en indiquant que « L’Église n’a pas vocation à se substituer aux autorités », les responsables chrétiens proposent « de mettre en place une commission permanente au niveau de la communauté d’agglomération, du département, voire de la région ».
A noter que cela fait maintenant au moins deux ans que le réseau de solidarité avec les familles Rroms, puis le collectif “pour que personne ne dorme à la rue” demandent la mise en place d’un processus de travail réunissant les associations, les élus et l’Etat. Demande hélas jusque là toujours refusée.

En conclusion, Mgr Lebrun, a cité Jésus : « Des pauvres, vous en aurez toujours avec vous ». Pessimisme de la raison ? Mais optimisme de la volonté, car pour l’évêque de St-Etienne, « le progrès est possible, les Roms ont un avenir chez nous ».

Voilà une vision sur laquelle pourront réfléchir les partisans d’une expulsion finale des Rroms, ceux qui estiment que les Rroms "n’ont pas vocation” à vivre parmi nous, et qu’il n’est pas possible que nous vivions avec eux, comme on a pu l’entendre ici et là ces dernières années.
Oui, des actes et un avenir de respect et de solidarité sont possibles.