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200 personnes samedi devant la gendarmerie de St-Etienne, pour soutenir Laurent Pinatel et exiger l’arrêt de la ferme industrielle des 1000 vaches

lundi 21 avril 2014

Laurent Pinatel, porte-parole national de la Confédération Paysanne, s’est rendu à la gendarmerie de St-Etienne, samedi 19 avril, où il était convoqué sur décision du procureur de la République de la Somme pour être entendu par le chef de la brigade criminelle d’Abbeville (rien que ça !) venu spécialement pendant ce week-end de Pâques.
Quand il s’agit de faire taire ceux qui s’opposent à ce projet nocif pour les paysans et pour la société, les autorités y mettent les moyens. Un nombre important de policiers (au moins 3 fourgons) et de gendarmes, sans parler des policiers en civil, était mobilisé samedi rue Claude Odde.
Laurent Pinatel est arrivé de sa ferme de St-Genest Lerpt en tracteur vers 9h15. A 9h40 il est entré dans la gendarmerie. Il a été aussitôt informé qu’il était mis en examen, pour une durée non précisée. Ainsi, en France en 2014, un responsable syndical est poursuivi pour une action collective...


Dans la rue Claude Odde, des paysans et d’autres personnes, citoyens et responsables associatifs, arrivaient depuis 9h. Rue barrée par des tracteurs côté stade. Et par des véhicules de Police côté grande rue...
L’ambiance n’était pas du tout à la résignation devant ce projet délirant et devant cette injustice qui consiste à poursuivre des paysans qui défendent une cause juste face à des financiers qui ne défendent que la loi du fric et bénéficient d’une marge de manoeuvre qui indique des appuis politiques.
Vin chaud, musique et chansons avec des participants des trois chorales La Barricade, la Ravachole et de St-Julien... Et innombrables discussions. Cette journée aura au final été l’occasion pour des milliers de personnes du département (et bien d’autres dans d’autres départements, où des actions ont aussi eu lieu, comme devant la gendarmerie d’Abbeville dans la Somme, à l’appel de l’association Novissen) de découvrir ou de prendre la mesure de ce qui est en jeu avec cette “ferme des 1000 vaches”. Bien au-delà donc des 200 personnes (au moins) qui sont venues rue Claude Odde. Parce que les téléphones et les messageries n’ont pas chômé samedi matin...

La ferme des 1750 bovins

M. Ramery est un financier (349ème fortune de France, évaluée à 120 millions d’Euros), et un grand patron du BTP qui a la chance de gagner un très grand nombre de marchés publics, plus que Vinci et Bouygues, c’est dire s’il est fort et sait comment s’y prendre... Là, il s’est mis dans la tête de faire de l’électricité avec du méthane, et de construire un méthaniseur géant alimenté pour moitié avec le lisier de 1000 vaches et pour le reste avec d’autres déchets.
1000 vaches ? En fait ce serait le double. C’est 1000 vaches laitières. Mais aussi leurs veaux. Et 750 génisses pour les remplacer au fur et à mesure. Bref : plutôt 2000 bovins entassés dans de vastes hangars. Une ferme industrielle. Une ferme usine. Ces vaches ne verraient jamais un pré, évidemment. Mais elles pisseraient du lait. Qui ne serait qu’un sous-produit de ce business et pourrait être vendu - annonce Ramery - 270€ les 1000 litres, soit en gros 100€ de moins que le prix actuel avec lequel tant de paysans sont déjà éliminés.
Et cette ferme industrielle est présentée par des ministres (ou ex ministres comme Mme Bricq) comme un projet pilote, une vitrine de l’agro-industrie. Avec ces fermes là, plus besoin des 70 000 fermes actuelles d’éleveurs laitiers. 2500 fermes usines comme ça suffiraient.
Un des problèmes de Ramery, c’est qu’il lui faut quand même des terrains pour étendre ensuite une énorme quantité de merde. Alors il achète et fait exploser le prix du foncier agricole, rendant impossible l’installation de jeunes paysans. Il a déjà acheté 1500 hectares dans la Somme. Avec ça le Préfet lui accorde 500 vaches. Il lui faut 3000 hectares pour 1000 laitières. Il s’en occupe, et se débrouille pour contourner les mécanismes de préemption de la SAFER. Le permis de construire était trop limité ? M. Ramery a passé outre. A un moment l’Etat a ordonné la démolition ? Il continue et a déposé une demande modificative. Il attend la réponse pour mai et annonce la première traite pour le 1er juillet...

Des appuis politiques inadmissibles

Le modèle agricole que prône Ramery est un désastre non seulement pour les paysans mais pour toute la société. C’est l’agriculture industrielle, celle qui tue l’agriculture paysanne. Il est inadmissible que le ministre de l’Agriculture Le Foll, par ailleurs prolixe en discours sur l’agroécologie, manoeuvre pour faire passer la ferme des 1000 vaches.
Ramery lui-même a vendu la mèche en déclarant un jour : “Si François me demande d’arrêter mon projet, j’arrêterai”. Mais François (Hollande) ne lui demande pas d’arrêter. Laurent Pinatel a dénoncé ces collusions qui vont jusqu’au sommet de l’Etat. Evidemment, Ramery a le soutien des dirigeants de la FNSEA et de tout l’agrobusiness.
Et cette fuite en avant vers l’agriculture industrielle fait école. Une autre ferme usine est annoncée dans le Limousin. Pendant ce temps là, c’est dur de s’installer paysan. En Rhône-Alpes par exemple, on est passé d’un peu plus de 500 installations en 2008 à 362 en 2013 ! Parmi tous les témoignages entendus samedi matin, Nicolas Clair, jeune paysan à Ste-Foy St-Sulpice dans la plaine du Forez expliquera comment de plus en plus des paysans ignorent à qui appartiennent des champs de maïs autour de leur ferme. Achetés par des propriétaires inconnus et lointains, qui font faire les travaux par des entreprises en lançant des appels d’offres...
Est-ce que c’est cela qu’on veut, est-ce que c’est cette agriculture là qui permettra de se nourrir suffisamment et correctement demain, et qui permettra à ceux qui veulent faire de l’agriculture leur métier de travailler et d’en vivre ?

Laurent Pinatel est sorti de la gendarmerie vers 13h. Libéré d’une garde à vue qui aura duré environ 4 heures.

Maintenant, le combat contre la ferme des 1000 vaches et l’agriculture sans paysans continue.

 Dans les médias... 
Des dizaines de journaux, radios, télés ont parlé de cette action à St-Etienne. En parlant par contre de seulement 50 à 60 paysans rassemblés (la faute à un chiffrage approximatif d’une dépêche AFP ?). Des dizaines de milliers de personnes auront découvert samedi ce qui se trame avec cette “ferme des 1000 vaches”...

Une interview de Laurent Pinatel dans Reporterre

Lire aussi Deux articles de Sophie Chapelle sur l’accaparement des terres en France et en Europe...

L’accaparement de terres et la concentration foncière menacent-ils l’agriculture et les campagnes françaises ?

La moitié des terres en Europe est contrôlée par 3% de gros propriétaires

Voir le dossier "1000 vaches" sur le site de la Confédération Paysanne : http://www.confederationpaysanne.fr

Le site de l’association Novissen