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Maurice Rajsfus à la fête du Livre de St-Etienne

lundi 18 octobre 2004, par Roger Dubien

M.Rajsfus, hier, à Saint-Etienne ©mpv

Cela fait 3 ans que Maurice Rajsfus participe à la Fête du Livre de St-Etienne. En 2002, sa venue avait été l’occasion d’un débat avec 80 jeunes sur "la société libérale sécuritaire". Question hélas toujours d’actualité...

Maurice Rajsfus continue à écrire, en faisant des rappels et en posant des questions qui dérangent.
Par exemple, va sortir en décembre à l’Esprit frappeur un petit livre : "L’affaire Pascal Taïs - Autopsie d’une bavure" qui a eu lieu au commissariat d’Arcachon, en 1993...
Et puis aussi, en janvier ou février, un gros livre : "La France bleu marine, de Marcellin à Sarkozy 1968-2004". A l’Esprit frappeur aussi.

Ce week-end, il signait surtout "La libération inconnue. A chacun sa résistance", publié au Cherche midi (19E). "Il est entendu que la France a été globalement résistante. Cette vérité première s’est surtout vérifiée autour de la mi-août 1944..."
Maurice Rajsfus n’a pas du tout apprécié que cet été, on ait voulu "faire croire que les policiers parisiens avaient été le fer de lance de l’insurrection parisienne. Un gros mensonge historique."
Il raconte comment les policiers sont rentrés dans la Résistance, après que Rol Tanguy leur ait mis le marché en mains. Et combien. Grève de la Police le 15 août 1944. Puis "prise" de la Préfecture de Police le 19. 800 policiers sur 20 000. Moins le soir même...
Il faut ramener les choses à leur juste proportion.
"Jusqu’à mi-août, ils ont porté la francisque de Pétain. Puis certains la Croix de Lorraine après". Il y a même eu un temps pas mal d’adhésions à la CGT et au PCF. On sait jamais (Maurice Rajsfus a même rencontré dans une réunion du pcf en octobre-novembre 1944 à Vincennes le policier venu rafler sa famille le 16 juillet 1942...). Mais ça n’a pas duré très longtemps.
Toute cette ré-écriture de l’histoire, Rajsfus n’accepte pas. Et il sait de quoi il parle. La rafle du 16 juillet 1942 par exemple. La Police française a fait du zèle. Les allemands n’avaient pas demandé de rafler les enfants juifs. La circulaire du 13 juillet 1942 (ordres de la Gestapo arrangés par la Préfecture de Police) indiquait que la Police française allait arrêter "25 000 juifs apatrides". Il n’était même pas question des juifs français.
Or 4 150 enfants ont été arrêtés ce jour-là, presque tous français. Dont Maurice et sa soeur, son père, sa mère, deux frères à son père, une tante et sa fille de 11 ans. Tous ont été assassinés, sauf Maurice et sa soeur qui en ont réchappé par miracle : ce jour-là, la Préfecture de Police a ordonné de relâcher les enfants de plus de 14 ans et de moins de 16 ans si les parents le voulaient. Ceux qui ont voulu rester ensemble sont morts dans les camps. Les parents de Maurice lui ont dit de partir, avec sa soeur.
En Pologne, toute sa famille a été exterminée. Son père et sa mère y avaient 10 frères et soeurs.

En France, dans les 2 ans qui vont suivre, 11 000 enfants juifs ont été arrêtés.
Combien de criminels ont-ils rendu des comptes sur ces crimes ?
Jusqu’au 15 août 1944, la Police française a massivement obéi aux ordres de Vichy et de l’occupant nazi.

Maurice Rajsfus n’aime pas l’histoire "officielle", celle qui a été sans cesse arrangée au profit des uns ou des autres. Cette histoire là, elle a pour pour caractéristique commune de survaloriser le rôle des chefs, des militaires, des appareils. De gommer ce qui fâche. De dévaloriser le rôle du peuple, des femmes et des hommes vivants, des résistants. L’histoire réelle est différente, et souvent plus dure aussi que celle qui est ré-écrite. Plus utile aussi pour les combats d’aujourd’hui et de demain. C’est pourquoi Maurice Rajsfus veut aider à ne jamais l’oublier.