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St-Etienne/Monaco

Punir les pauvres, enrichir et couvrir les plus riches

lundi 21 novembre 2005, par Roger Dubien

Il y a comme ça des raccourcis qui en disent long sur une époque et sur la classe politique qui squatte actuellement les pouvoirs.
Lundi 14 novembre, au conseil municipal de St-Etienne, ça a chauffé à propos de la révolte des jeunes dans les quartiers et les banlieues. Enfin, ça dépend du point de vue duquel on se place, car pour certains, il ne s’agit que de délinquance qui doit être matée sans pitié.
Le député UDF/UMP de St-Etienne Artigues y est allé de son couplet pour demander plus de répression. Il a même dit qu’il avait interpellé à ce propos à l’Assemblée Nationale le ministre de la Justice P. Clément. Un voisin d’ailleurs puisque celui-ci préside le conseil général de la Loire, juste de l’autre côté de la Place Jean Jaurès.

Effectivement, M. Artigues a interpellé "le Garde des sceaux à propos des violences urbaines stéphanoises".
Dans le texte, ça donne ceci :
"M. Gilles Artigues - L’agglomération stéphanoise a été la cible de violences urbaines sans précédent : outre des véhicules brûlés, comme ailleurs en France, des incendies ont touché l’école maternelle Saint-Saëns ainsi qu’un bus. Nos concitoyens ne comprennent pas ces actes qui touchent les plus modestes et qui entretiennent un sentiment d’impunité.
S’il y a eu des arrestations, tous attendent une réponse à la hauteur de la situation. Quel dispositif avez-vous prévu pour accélérer les procédures contre les fauteurs de trouble, et notamment les mineurs ? Je voudrais également savoir comment les victimes pourront bénéficier de la juste indemnisation qu’elles réclament."

Et le ministre n’a pas déçu l’attente du député :
"M. le garde des Sceaux - Je regrette d’autant plus douloureusement les faits relatés qu’ils affligent une population déjà lourdement touchée. J’ai envoyé aux parquets des instructions de fermeté, et vous n’ignorez pas qu’il est possible d’infliger des sanctions aux 16 -18 ans. S’agissant des plus jeunes, des réponses existent également : le placement en foyer, le suivi socio-éducatif ou le recours aux centres éducatifs fermés - 12 jeunes ont depuis lors fait l’objet d’un placement ces jours derniers.
J’ai demandé la plus grande fermeté dans les réquisitions, ainsi que des appels systématiques dans l’hypothèse où les juges du siège ne suivraient pas le parquet dans ses demandes de peines de prison ferme. Nous avons donc fait le nécessaire. Pour l’effet dissuasif de ces mesures, je me permets de vous renvoyer aux déclarations de M. Lagarde.
Certains se demandaient en effet si notre sévérité ne ferait pas empirer les choses : les élus des quartiers sensibles témoignent du contraire !..."

En matière de répression et de stigmatisation, MM Artigues et Clément en connaissent tous les deux un rayon. Ils ont par exemple ensemble fait ce qu’il fallait pour faire capoter le projet de création d’un centre de semi-liberté dans le quartier de Montaud à St-Etienne, dans des conditions tout à fait lamentables (Voir : Emballement du délire sécuritaire ? Le Président du TGI et le Procureur de la République outragés à St-Etienne)

Et au même moment où MM Artigues et Clément communient dans l’appel au maintien de l’ordre et l’appel à enfermer les jeunes qui se révoltent, leur gouvernement vient de décider de réduire les impôts des plus riches, probablement pour régler la crise sociale et ramener un peu d’argent vers les quartiers populaires saignés à blanc.

Mais ce n’est pas tout : ce week-end on vient de voir sur les écrans de télévision le ministre de la Justice P. Clément s’afficher ostensiblement à Monaco pour le sacre du successeur. Y est-il allé traquer la délinquance ? Car Monaco est comme chacun sait un paradis fiscal où l’impôt sur le revenu n’existe pas, pas plus que sur les successions. C’est pourquoi un paquet de milliardaires français persécutés par les politiques de justice sociale menées en France depuis 30 ans (!!) - et pas mal de maffieux - y ont déménagé leurs fortunes. Et y jouent tranquilles à cache cash.

Envoyer le ministre de la Justice représenter la France à Monaco quand les quartiers populaires se révoltent de misère et que le gouvernement allège l’impôt sur les plus riches : tout est dit.

Roger Dubien
conseiller municipal.