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Chronique d’une élue citoyenne au Conseil départemental de la Loire

Démocratie à (ré) inventer ?!?

mercredi 18 mai 2016, par Violette Auberger

Depuis quelques années je m’interroge sur la place du citoyen dans les processus de décision, dans les choix politiques, les choix qui orientent notre société.
Quand j’ai décidé de me présenter aux élections départementales, c’était justement dans l’objectif d’être au cœur des décisions. C’était sans compter sur la dictature de la majorité, fleuron de notre système...

Ce système ne me convient pas, je rêve d’échanges, de débats, de décisions consensuelles...
Mais ces modes de décision sont des modes qui ont une temporalité bien différentes de ce qu’on nous inflige actuellement (aller plus vite à coup de 49 -3 pour ne pas avoir à discuter...)

Hors de mon mandat, mais juste à coté, nous nous étions engagés à mettre en place un conseil de secteur avec Jean Bartholin, mon binôme au Département.

Ce conseil de secteur a plusieurs objectifs :

- A l’heure où les cantons ruraux ont augmenté considérablement leur périmètre pour atteindre les 30 000 habitants, il nous permet d’établir des liens plus importants avec des citoyens référents, d’être plus au courant des problèmes, initiatives, existants sur le terrain

- Pour ma part, c’est aussi l’occasion d’avoir des personnes « ressources » lorsque je me pose une question sur un thème précis, je peux donc échanger, réfléchir, m’informer .

- Lors de nos réunions, nous organisons des actions, nous débattons.

La venue d’Héloïse Nez, maître de conférences à Tours, programmée par les réseaux citoyens sur Saint-Etienne, nous donnait l’occasion de profiter de sa présence pour qu’elle apporte réflexions, outils et exemples .
Notre journée s’est articulée autour de deux interventions : la première à Champoly sous forme d’un débat, puis le soir à Renaison sous forme d’une conférence suivie d’un débat.

Une centaine de personnes a participé aux rencontres à Champoly et Renaison...

- nous avons abordé l’intérêt du tirage au sort couplé à notre mode de représentativité pour que les instances ne soient plus verrouillées par des élus qui ne doivent rien à personne une fois élus.

- l’importance de la concertation avec les citoyens avant de mettre en place de grands projets qui ne correspondent pas toujours aux besoins du terrain ( ouvrir une crèche plutôt que d’avoir une place flambant neuve

- elle nous expose l’intérêt de l’outil informatique, qui permet aux citoyens de faire des propositions et de voter pour celles qu’ils trouvent les plus pertinentes ; ainsi, dans une commune d’Espagne, si une proposition atteint les 2 % elle sera discutée en conseil municipal !

- Héloïse a développé les choix parfois difficiles ayant eu lieu au sein du mouvement des indignés mais aussi de Podemos concernant la structuration ou pas du mouvement, choix qui d’ailleurs ne fait pas consensus et est source de tension au sein de Podemos. Podemos a choisi une structuration extrêmement classique et hiérarchisée.

Dans cet exemple de l’Espagne, deux groupes se sont d’ailleurs formés avec des objectifs différents :
- le premier est plutôt orienté « court terme », élection, résultat rapide.
- le deuxième est dans une temporalité plus longue et ne souhaite pas s’inscrire dans les institutions qu’il rejette.

Héloïse nous offre des exemples d’expériences : des expérimentations se passent avec un caractère obligatoire ou volontaire en France et ailleurs, tel est le cas des conseils de quartier obligatoires pour les communes de plus de 80 000 habitants, souvent mis en place par les municipalités pour des populations inférieures.

Mais les conseils de quartier ressemblent d’avantage à des outils permettant de donner bonne conscience à des élus qui n’ont pas forcément toujours envie de laisser une partie de leur « pouvoir » entre les mains des habitants.
Les budgets participatifs sont souvent des leurres et ne concernent que des projets secondaires sans réel impact sur les choix politiques.

Des expériences plus intéressantes ont lieu notamment dans le quartier de Belleville à Paris ou dans la ville de Cordoue :
- http://montbouge.info/spip.php?article588
- http://www.metropolitiques.eu/La-democratie-participative-en.html

Au Brésil, notamment à Porto Alegre, des expériences sont menées depuis la fin des années 1980, où existe un budget participatif dans un structure parallèle au conseil municipal. Ce dispositif est tellement enraciné maintenant que les mairies se succèdent sans qu’aucune ne remette en cause ce dispositif !
Les habitants se sont emparés de cet outil et se sont impliqués, d’autant plus qu’ils peuvent voir les résultats sur le terrain dans leur quartiers et ont pu réorienter des moyens dans les quartiers défavorisés.

La ville de Madrid , depuis que la coalition d’unité populaire avec Podemos a emporté la mairie en juin dernier, a mis un place un système dans lequel des propositions mises sur Internet et votées par 2% de la population font l’objet d’un référendum, et la mairie s’engage à respecter le résultat du référendum. C’est une démarche proche des référendums d’initiative populaire qui sont organisées notamment en Suisse, en Allemagne et aux Etats-Unis.

https://www.monde-diplomatique.fr/1998/08/CASSEN/3978

En conclusion, l’espoir est bien là, les alternatives existent, nous devons nous libérer des schémas classiques et avoir l’audace et le courage d’imaginer d’autres formes d’organisations adaptées à nos territoires.

Violette Auberger