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Miguel Benasayag : « Chavez incarnait une légitimation du désir de justice sociale »
vendredi 8 mars 2013
Philosophie magazine publie ce 8 mars une interview de Miguel Benasayag, après la disparition d’Hugo Chavez...
En tant que militant de gauche, comment vous situez-vous par rapport à Hugo Chavez ?
Je suis de la gauche alternative, ni chaviste, ni anti-chaviste. J’appartiens à une lignée qui, suite à la lutte armée contre les dictatures, a lancé une série de mouvements : les sans-terre[1], l’indigénisme[2], etc. Cette gauche de contre-culture a cessé de viser le pouvoir en pariant sur le changement social. Son action repose sur la création de structures de coopération, de récupération d’usines, de distribution par troc… Elle connaît un essor très important après la chute des dictatures sud-américaines, mais elle échoue à proposer une alternative de pouvoir, puisqu’elle en fait une question certes importante, mais secondaire.
Dans quel contexte la figure de Chavez a-t-elle émergé ?
Après la chute des dictatures, ce sont les différents gouvernements néolibéraux qui tombent. Mais aucune alternative politique n’existe. Un slogan émerge alors, donnant sens à ce désenchantement : « Que se vayan todos ! » (Qu’ils s’en aillent tous !) Il exprime un dégoût face aux politiciens, de droite comme de gauche. Aucun changement radical n’étant envisageable, le vote se porte alors, par dépit, sur les leaders des partis de gauche, les aspirations étant tout de même plutôt portées vers la démocratie. Des gouvernements se forment au Brésil, en Bolivie, en Argentine, en Équateur, au Pérou, au Paraguay… Parmi eux, Chavez.
Qui était Chavez ?
Hugo Chavez, d’abord identifié comme un putschiste nationaliste, se rapproche ensuite d’un populisme de gauche aux accents bonapartistes, que soutiennent des mouvements du centre, voire droitiers. Fort de ces appuis, et dans un contexte de désillusion politique, Chavez tente dans les années 1990 une OPA sur tous les mouvements révolutionnaires en Amérique latine. Il entend se présenter comme Fidel Castro dans les années 70 : un libérateur.
Dans les faits, il agit comme tous les gouvernements sociodémocrates au pouvoir, sans latitude d’action, incapable de réformer les structures économiques et sociales : ceux de Lula au Brésil, de Kirchner en Argentine ou de Mujica en Uruguay.
En ce sens, Chavez était donc tout sauf un dictateur. Comme tous les gouvernements progressistes en Amérique latine, il a respecté les structures sociales et de production du pays, sans les changer de force. Il a également usé d’un atout, le pétrole, qui lui a permis d’exercer une redistribution, faisant effectivement et concrètement diminuer la pauvreté, sans modifier en profondeur le système, voire en l’entretenant. En revanche les gouvernements en Argentine, en Uruguay ou au Brésil, présentent clairement leur action comme relevant du « capitalisme social » tandis que Chavez, démagogue, se présentait comme un libérateur.
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