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"L’homme n’est pas une marchandise comme les autres" !

Sarkozy : ultra-capitalisme et fascisation rampante...

mardi 21 novembre 2006, par Roger Dubien

Sarkozy est venu à St-Etienne le 9 novembre. On pourra bientôt lire par ailleurs (à télécharger) le témoignage et les impressions de Sophie, qui a pu rentrer au meeting...

Sarkozy est donc venu à St-Etienne le jour même où Chirac et d’autres étaient à Colombey, puisque c’était l’anniversaire de la mort de De Gaulle. Ceci a encore donné lieu pendant 48 heures dans les médias nationaux à des développements sur la prétendue opposition des sarkozystes et des chiraquiens. C’est vrai que dans la démocratie représentative délégataire, la compétition est une maladie congénitale, comme dans le système capitaliste. Mais attention à ne pas se laisser enfumer. Ce sont des forces sociales bien caractérisées qui portent Sarkozy. Et on peut vous le dire : ici, c’est toute la droite qui entourait et ovationnait Sarkozy au Palais des expositions. A commencer par le proche de Chirac Cabal, député de droite extrême, aux côtés des ministres Perben et Clément et du Maire UMP ex-UDF Thiollière, des millionnistes et des de villiéristes de son équipe. Au moins cette union sacrée le jour même où les médias rabâchaient le contraire aura permis aux stéphanois de faire le constat d’un décalage.

"La France dans la mondialisation" : c’était le thème annoncé du meeting. On sait que "liberté" (??) totale pour le capital ne doit pas être confondu avec liberté pour les êtres humains. On le confirme : ça fait toujours deux. A commencer par la liberté de circulation. Parce que pour s’approcher du Palais des Expos, il fallait réussir à passer des barrages.

D’abord, entre la gare et Plaine Achille, les 4 voies et les 2 contre-allées du boulevard Jules Janin étaient barrées par un dispositif grillagé d’allure aussi militaire que celui de Vienne le jour du procès de Sanchez et des paysans de la Confédération paysanne. Un énorme déploiement de gardes mobiles avec tout l’attirail pour le combat de rue. Pour arrêter qui ? On se le demande. Probablement d’abord parce que ça fait partie de l’ambiance recherchée...
Une soixantaine d’hommes et de femmes, surtout des jeunes, du Réseau Education sans Frontières étaient bien là avec une banderolle. Et n’ont donc pas pu faire les 500 derniers mètres jusqu’à l’entrée de la Plaine Achille. Certaines réalités ne doivent pas être vues...
C’est vrai aussi qu’il y avait face aux forces "de l’ordre" une cinquantaine de pompiers, présents pour des revendications touchant à leur statut et à leurs salaires, mais apparemment pas venus pour tout casser. Un peu étonnante cependant l’inscription : "Sarko, arrête ton blabla, agis". Car si ce type a la possibilité de multiplier des actes qui ressemblent encore plus à son ramage, on peut craindre que les pompiers aient pas mal de blessés à aller récupérer dans les prochaines années.

Pour ceux qui sont venus par l’autre côté du boulevard, et ont pu s’approcher un peu plus de l’entrée du Palais des Expos, là ce sont les vigiles du service de sécurité de l’UMP qui officiaient et triaient. Des dizaines de jeunes qui ne paraissaient pas "sûrs" ont été repoussés. Est-ce bien légal de trier comme ça les gens pour une réunion publique, dans un lieu public ? En tous cas, ça en dit long sur les conceptions...
Donc, n’entrait pas qui voulait. Mais ne restait pas qui voulait non plus. Comme ce jeune en a fait l’expérience, repéré par un vigile parce qu’il n’applaudissait pas. Direction la sortie. Ici, obligation d’applaudir le chef.

Pour la plupart des 5 000 qui étaient là (selon les chiffres officiels et de la presse, pour une fois concordants - mais attention, la mobilisation de la droite est bien réelle, elle a trouvé son champion), il n’y avait pas besoin d’obliger à applaudir. Et ça vient par exemple du fond des tripes quand le ministre de l’intérieur s’en prend aux voyous et à "ceux qui prétendent rester en France alors qu’ils ne l’aiment pas, la France"...

Démagogie. Sarkozy a prétendu saluer St-Etienne, "ville rongée par la mine". Curieuse, cette expression. On savait des villes rongées par la guerre, ou par la violence, ou la corruption. Mais "rongée par la mine ? Un affleurement du dégoût des aristocrates pour l’histoire ouvrière et populaire ?

La "mondialisation", la globalisation capitaliste, Sarkozy est venu la défendre. Son objectif, c’est d’"endiguer le rejet de la mondialisation". Et pour cela, il faut être du côté des "gagnants", et pas de celui des "perdants". Un monde de "gagnants" et de "perdants", voilà des mots qui galvanisent la droite. Et pour ça, il faut être "compétitifs", donc réduire sans fin le coût du travail, bien sûr. Dans ce domaine ce ne sont pas les idées qui manquent, d’autant que ça se fait déjà tous les jours, et depuis longtemps. Allons-y, donc : supprimer les 35 heures, supprimer les charges sur les heures supplémentaires. Baisser encore les impôts et les impôts des entreprises. "Tailler dans les dépenses de l’improductivisme", supprimer les indemnités aux "chômeurs qui ne cherchent pas d’emploi ou ne suivent pas de formation", leur supprimer les allocations. Ovation ! (1)

"Valoriser le travail"... Il va falloir démonter ce discours sur le travail. Quel culot, quand on sait combien ce n’est pas le travail qui est reconnu aujourd’hui en France. Voir la répartition des richesses entre ceux qui travaillent et les actionnaires des grands groupes, entre le peuple et la bourgeoisie.
Sa politique, c’est l’insécurité sociale, la poursuite du démantèlement de tout ce qui est "Etat social". Et c’est parce qu’il casse l’Etat social qu’il parle d’instaurer un "Etat protecteur", mais il faut traduire : sécuritaire, policier, pénal. Un "Etat fort", un Etat au service total des capitalistes et qui fasse régner l’ordre, quand la sécurité de la vie fout le camp par tous les bouts. Ne cherchons pas les droits humains dans tout ça. Le summum est atteint avec ces mots :  "L’être humain n’est pas une marchandise comme les autres"  . Cette phrase en dit long ! (2).
Ultra-capitalisme et totalitarisme sont les deux mamelles de sa politique.

Comment peut-on résister à cette contre-révolution bushienne ? Bien entendu chacun-e pourra faire ce qu’il faut au moment de l’élection présidentielle pour écarter le pire. Mais attention : c’est dans les profondeurs de la société que la partie se joue. Et c’est au quotidien qu’elle se joue, et pas seulement et principalement dans 5 mois. Ce n’est pas en se jetant dans les bras de tel-le ou tel-le condidat-e à la présidentielle qu’on résistera à la menace... Délégation et attentisme sont deux fléaux qui mènent aux défaites des peuples. L’engagement citoyen quotidien pour la transformation sociale maintenant est le meilleur chemin pour barrer la route aux bushiens français.
A travers quelles actions, quelles initiatives, quels projets ? N’est-ce pas sur ces questions que nous devrions nous concentrer ?

Roger Dubien.

(1) A un moment, le courant n’est plus passé : coupure d’électricité, tout le Palais des expositions a été plongé dans le noir. Incident technique ou sabotage ? Il parait en tous cas que le service d’ordre de l’UMP a littéralement saccagé les installations de sécurité, pour faire taire les alarmes. Il sera éventuellement intéressant de regarder qui va payer la facture...

(2) Il y a 160 ans, en 1847, un type, juif allemand, écrivait :
"Vint enfin un temps où tout ce que les hommes avaient regardé comme inaliénable devint objet d’échange, de trafic et pouvait s’aliéner. C’est le temps où les choses mêmes qui jusqu’alors étaient communiquées mais jamais échangées ; données mais jamais vendues ; acquises mais jamais achetées - vertu, amour, opinion, science, conscience, etc. - où tout enfin passa dans le commerce. C’est le temps de la corruption générale, de la vénalité universelle, ou, pour parler en termes d’économie politique, le temps où toute chose, morale ou physique, étant devenue valeur vénale, est portée au marché."
Misère de la politique ! L’histoire a patiné. Sûr qu’il n’avait pas prévu que ce temps dure aussi longtemps. Les forces qui portent la "rupture" de Sarkozy veulent nous y enfermer un peu plus dedans. Nous ce qu’on veut toujours, c’est en sortir.