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OGM en France et ailleurs : là aussi, ne pas crier victoire trop tôt...

L’assemblée générale 2013 des Faucheurs Volontaires aura lieu à Burdignes (dans le Pilat) les 4 et 5 mai.

jeudi 25 avril 2013, par Roger Dubien

On connaît le message diffusé ces dernières semaines par celles et ceux qui agissent contre le SIDA : "ne crions pas victoire trop vite". Bien que ça n’aie évidemment rien à voir, celles et ceux qui agissent contre les OGM pourraient reprendre cette même phrase : attention à ne pas croire que la partie est gagnée.
Pourtant on aurait pu espérer que le pire ne soit plus à l’ordre du jour. Dans la société, le refus des OGM ne s’est pas affaibli, bien au contraire. L’étude de l’équipe Séralini, fin 2012, a eu un retentissement mondial. Toutes les tentatives pour la discréditer ont échoué. On se souvient par exemple d’une déclaration immédiate de plusieurs académies invalidant cette étude soi-disant pour des raisons statistiques. Manque de chance, “le” statisticien de l’Académie des Sciences, Paul Deheuvels, a ensuite validé cette étude, après l’avoir analysée...

Mais quelles décisions ont-elles été prises depuis ? On aurait pu penser qu’avec le gouvernement issu du changement politique du printemps 2012, les choses devaient s’arranger, que la nocivité et le rejet des OGM seraient enfin pris en compte réellement...
Eh bien non. Quand on met bout à bout les décisions de ces derniers mois, et si on veut bien s’efforcer de garder les yeux ouverts, on peut vérifier que non, ça ne s’est pas vraiment arrangé.
Les forces qui imposent les OGM n’abandonnent jamais. Si elles peuvent continuer à créer des faits accomplis et poursuivre leurs activités, elles le font. Et malheureusement c’est bien ce qui se passe...

En France, l’idée est par exemple assez largement répandue que les OGM sont interdits. Et on reste dans une situation de flou qui arrange bien les promoteurs des OGM.
C’est vrai que les OGM sont interdits à la culture. En Europe, d’ailleurs, seuls 2 (le maïs Monsanto 810 et la pomme de terre Amflora) sont autorisés à la culture... Et ils représentent moins de 0,2% des surfaces agricoles cultivées.
Mais ceci ne tient pas compte du fait que le tournesol OGM obtenu par mutagénèse est maintenant massivement présent dans les champs et dans l’huile de tournesol vendue dans le commerce. Sans aucun étiquetage (puisque la directive européenne 2001-18 qui régit les OGM stipule que les OGM obtenus par mutagénèse sont bien des OGM, mais les dispense d’être soumis à la réglementation des OGM !).
Et puis une trentaine d’OGM sont autorisés à l’importation en Europe et donc en France. Le soja OGM notamment est massivement utilisé pour l’alimentation du bétail (bovins, porcs, volailles), et tout ça se retrouve dans notre assiette, sans qu’on le sache (pas d’étiquetage), tout en le sachant quand même...

D’autre part, un vaste programme de mise au point de blés OGM est mené - avec d’énormes fonds publics - par le groupe Limagrain. Dans les calculs de ces firmes, le pain OGM est pour demain... Est-ce que c’est cela qu’on veut ?

Alors, où en est-on ? Comment continuer aujourd’hui le combat contre les OGM ? Ce sont des questions que beaucoup se posent...

L’Assemblée Générale annuelle des Faucheurs Volontaires aura lieu à Burdignes (42), dans le Pilat, samedi 4 et dimanche 5 mai.

L’AG annuelle des Faucheurs Volontaires est un moment important pour ce mouvement : celui qui permet de faire le point, et de prendre des décisions sur les priorités et les modes d’action...
En parallèle de l’AG des militants, deux soirées seront ouvertes à toutes et à tous, et auront lieu à la salle municipale du Tilleul, à Burdignes :
- une soirée-débat autour du film de Marie-Monique Robin "Les moissons du futur", vendredi 3 mai à 20h. Après le film, débat : où en est-on sur les OGM aujourd’hui ? L’action des Faucheurs, etc...
- une soirée chansons avec la Barricade de St-Etienne, Michèle Bernard, Claudine Lebègue, et les Faucheurs... samedi 4 mai à 21h. Avec un repas possible à partir de 20h.

On peut donc aller rencontrer les FV début mai à Burdignes. Pour faire le point de la question des OGM avec eux, les soutenir, etc...

 Dans le paysage, concernant les OGM...  

25 février 2013 : les Etats membres de l’Union européenne ont rouvert la voie des autorisations d’OGM

Ils ont adopté un réglement proposé par la Commission européenne pour régir l’évaluation sanitaire des PGM-Plantes Génétiquement Modifiées. Ce règlement est censé renforcer les évaluations pour quelques cas. Mais par ailleurs il dispense le plus grand nombre de dossiers de demandes de toute évaluation.
Comment ça ? En fait, il déclare insuffisantes les évaluations actuelles, mais il les maintient pour tous les OGM en cours de demande d’autorisations, et il est indiqué que le nouveau règlement ne s’appliquera que dans 6 mois. D’ici là, une cinquantaine de nouveaux OGM sont dans les tuyaux pour être autorisés. Pour une trentaine, il s’agit de demandes d’importation et de transformation. Et pour 27 d’une demande de culture. Voilà du boulot pour des années pour les firmes qui font faire autoriser leurs OGM...
Et d’après ce qu’on sait, la France a voté en faveur de ce règlement ! Comment est-ce possible ? (1)

Tournesols OGM mutés : la manifestation du 9 avril à la coopérative "La Dauphinoise" (38)...

Le 9 avril, avec la Confédération paysanne, une soixantaine de personnes se sont rendues dans les locaux de la Coopérative "La Dauphinoise" à Estrablin, près de Vienne (Isère) pour dénoncer les tournesols OGM mutés. D’autant que depuis 2 ans, le Président de la Dauphinoise refusait de s’expliquer sur sa politique de développement des tournesols OGM...
Les gendarmes étaient présents en nombre. Et 7 à 8 personnes seulement ont pu après négociation pénétrer dans les locaux, avec des journalistes, rencontrer le directeur du site et le vice-président de la Dauphinoise, et inspecter le hangar.
L’argument des responsables de La Dauphinoise n’est pas original : "toutes les semences que nous vendons sont conformes à la réglementation". Le problème est que les tournesols mutés sont des OGM, pas considérés comme tels par la réglementation, c’est sûr, mais OGM, c’est certain (2).
C’est pourtant ce que nient les administrateurs de la Dauphinoise, en disant qu’il existe des plantes mutées depuis longtemps : le triticale, le blé Renan, et que même les bios...
Au passage, ils ont confirmé que 40% des semences de tournesol vendues dans la région sont des "VTH-variétés tolérantes aux herbicides", c’est-à-dire des tournesols OGM. Ce qui veut dire que l’huile disponible sans plus de précision dans le commerce est de façon massive issue d’un mélange comprenant des tournesols OGM...
Quant au colza OGM muté, la Dauphinoise dit qu’il n’intéresse pas pour le moment les producteurs de la région. Mais que si une demande forte apparaissait...
Il n’a pas été trouvé de semences OGM dans le hangar, ni d’herbicides spécifiques. Etonnant puisque 40% des semences distribuées sont OGM. L’essentiel des semences aurait déjà été distribué. Et puis un petit ménage avait peut-être été fait...

La Confédération paysanne a demandé aux responsable de la Dauphinoise d’être transparents vis à vis des coopérateurs, des acheteurs et des producteurs de semences. Elle les a aussi interpellé sur les conséquences de la commercialisation des tournesols mutés pour l’alimentation animale, particulièrement en Rhône-Alpes où de nombreux signes de qualité (AOC, Bio, IGP) refusent les OGM.
Et puis la Conf’ interpelle les pouvoirs publics régionaux, sur la contradiction qu’il y a à recommander la mise en culture de ces variétés OGM pour prétendument lutter contre l’ambroisie et les risques environnementaux que ces cultures entraînent.

Procès de Tours pour le fauchage de tournesols OGM mutés : même les témoins sont condamnés !

Au terme d’un procès incroyable (avec une première : la condamnation des témoins !) tenu en novembre 2012, le jugement a été rendu fin mars 2013 : deux Faucheurs Volontaires, Fabien Houyez et Bruno Stree, ont été condamnés à 3 mois de prison avec sursis, et à 5 000 euros de dommages et intérêts. André Puygrenier, le troisième Faucheur poursuivi, a été relaxé, pour des raisons que le Tribunal n’a pas su expliquer.
Le fauchage avait eu lieu le 24 juillet 2010 à Saint-Branchs et à Sorigny en Indre et Loire. 3 personnes avaient ensuite été choisies pour l’exemple, parmi les 119 qui avaient revendiqué cette action et les 75 qui s’étaient portés "comparants volontaires" et étaient venues au Tribunal en novembre 2012 pour demander à être jugées. C’est devant le refus du Tribunal et le déni de justice que constituait le choix de 3 personnes au hasard, que les accusés avaient quitté la salle du Tribunal, et que leurs 5 témoins - dont Marc Dufumier, Guy Kastler... - avaient dans ces conditions refusé de témoigner. Ce pourquoi ils avaient séance tenante été condamnés à 350 euros d’amende chacun ! Sans précédent.
En fait, ce procès était le premier procès de la mutagénèse. Et tout a été fait pour empêcher qu’il se tienne correctement et que les choses soient mises sur la table et discutées publiquement !
Les deux condamnés ont fait appel. Pour que le procès des OGM obtenus par mutagénèse puisse avoir lieu.

José Bové, François Dufour et 5 autres Faucheurs condamnés en cassation à 173 700 euros de dommages et intérêts pour deux fauchages dans la Vienne.

il s’agissait avec ce procès de deux fauchages de maïs Monsanto 810 le 15 août 2008 dans la Vienne, à Civaux et à Valdivienne.
Les Faucheurs avaient été relaxés en 2011 en première instance. Puis condamnés en appel par la Cour d’appel de Poitiers en février 2012. La cour de cassation vient de confirmer la condamnation.

Trois d’entre eux devront payer 100 à 200 jours-amende à 6 euros. Mais surtout, les 7 devront payer 38 000 euros de dommages et intérêts à l’agriculteur propriétaire du champ de l’essai Monsanto et 135 700 euros à Monsanto ! Soit 173 700 euros !
Le plus extraordinaire dans cette affaire est que les cultures d’OGM en plein champ avaient été interdites en France en février 2008. C’est donc la justice qui aurait du ordonner la destruction de ces cultures.
Mais en cours de procédure, il y a eu changement de la qualification des faits. Il s’agissait d’abord de "destruction de biens d’autrui". Mais comme les cultures commerciales de Monsanto 810 étaient interdites par la loi, c’est devenu "destruction de parcelles expérimentales", pour utiliser le fait que les cultures d’essais en plein champ n’ont été interdites par la loi, elles, qu’en octobre 2008...
Monsanto a trouvé ce jugement "extrêmement satisfaisant".
Les condamnés, parmi lesquels José Bové (député européen) et François Dufour (vice-président du conseil régional de Basse-Normandie) vont peut-être saisir la Cour Européenne des droits de l’homme à Strasbourg.

Pour le collectif des Faucheurs, la somme à verser et énorme, et devient immédiatement exigible même si la Cour Européenne est saisie.
A noter que récemment, les Faucheurs ont été condamnés à 55 000 euros de dommages et intérêts à verser à l’INRA (qui avait demandé 550 000 euros !) suite à l’arrachage de la vigne OGM de Colmar...

Le "Monsanto Protection Act" aux USA...

Le Congrès américain vient de voter une loi cadre sur les dépenses du gouvernement, dont les dépenses liées à l’agriculture. Elle est le résultat des négociations entre démocrates et républicains sur un budget provisoire, dont on nous a rebattu les oreilles pendant des semaines.
Mais surprise : ont été glissées subrepticement dans cette loi de 78 pages quelques lignes qui permettent au ministère US de l’agriculture de ne pas tenir compte des décisions de Justice. Et ceci se révèle être un cheval de Troie de l’industrie des biotechs, Monsanto en tête. Pourquoi cette manigance ? Parce que des Tribunaux ont suspendu récemment des autorisations accordées par le ministère de l’agriculture pour des OGM (betterave GM, luzerne GM).
C’est un sénateur notoirement financé par Monsanto et autres trusts de l’agrobusiness qui a fait le coup. Obama n’a pas mis de véto. Et la loi stipule donc en fait que Monsanto est maintenant au-dessus des lois, pour un an. Bien joué... (3)

Le 15 avril à Trèbes (Aude), des militants anti-OGM ont investi à nouveau le site de Monsanto.

Une centaine de militants - faucheurs volontaires, paysans de la Confédération paysanne ... - sont rentrés sur le site du chef de file US de l’industrie des OGM. 
Les forces de l’ordre étaient présentes mais n’ont pas pu les en empêcher.
Les anti-OGM recherchaient des semences de maïs OGM, notamment Mon810, interdit en France. On se souvient que de telles semences avaient été découvertes sur ce même site en janvier 2012 (4).
L’action visait aussi à protester contre l’extension de Monsanto, qui est en train d’agrandir ses installations à Trèbes après avoir acheté 2 hectares, pour y construire - pour 50 millions d’euros - 60 nouveaux silos...


(1) Lire un article d’Eric Meunier sur Inf’ogm

(2) Voir : Obtenus par mutagénèse ou par transgénèse, les OGM sont des OGM !

(3) Voir Sophie Chapelle dans Bastamag : Les États-Unis adoptent une « loi protégeant Monsanto
et C. Noisette http://www.infogm.org

(4) Voir Monsanto a été pris la main dans le sac de semences OGM et de pesticides interdits