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Les nouvelles technologies de manipulation du vivant

lundi 31 août 2015, par Annick Bossu

Les Faucheurs volontaires ont été amenés à réagir depuis un an contre un projet d’Etat : le projet GÉNIUS (voir GÉNIUS : un programme de recherche français pour produire des OGM). Ils ont ainsi découvert l’étendue des nouvelles biotechnologies, ce qui s’y apparente et les dangers que ces recherches ou travaux entraînent ou entraîneront dans tous les domaines du vivant.

D’autre part, c’est normalement fin 2015 que la Commission Européenne devrait statuer si ces nouvelles techniques relèvent des OGM on non. (en fait la commission en a listé 7 en 2008 et en excluant la biologie de synthèse au motif que c’est un domaine trop vaste !)

Nous proposons dans cet article de vous présenter ces technologies nouvelles et de dire pourquoi les Faucheurs volontaires s’y opposent dans les domaines qui les concernent.

(en italique : rappel de quelques connaissances scientifiques)

1 - Présentation des nouvelles technologies de manipulation du vivant

-> Ces nouvelles biotechnologies sont possibles avec les progrès de la bio informatique : séquençage de l’ADN et recensement des caractères d’intérêt des plantes et ceci à un moindre coût. (ADN : très longue molécule en forme de double hélice constituée de 2 brins - chaque brin est une suite de nucléotides - nucléotide : unité de base de l’ADN - 4 différents : A, T , G , C - les gènes sont des fragments d’ADN - c’est l’ordre des nucléotides ou séquence qui constitue une information dans le gène - il existe de l’ADN non génique).
Grâce aussi au progrès des cultures in vitro : on travaille au niveau des cellules et pas de la plante entière, après on cultive ces cellules sur un milieu nutritif approprié et avec des hormones de croissance pour qu’elles regénèrent une plante.

-> Lors de la transgénèse (OGM « classique »), le gène inséré ou transgène s’insère n’importe où et parfois n’importe comment dans le génome (génome : ensemble des gènes) avec des perturbations du fonctionnement cellulaire que les faucheurs volontaires dénonçent depuis toujours et que reconnaissent les scientifiques. D’ où leurs efforts pour mieux cibler cette insertion. Mais ce que l’on insère peut être autre chose qu’un gène.

-> En gros les biotechnologies proposent :

- l’insertion ciblée d’un gène
- la modification du gène en place (gene editing : réécriture du gène)
et dans les 2 cas, soi-disant sans modifier l’environnement du gène !

On peut introduire autre chose que de l’ADN dans les cellules pour modifier non pas un un gène mais son expression.
(L’expresssion d’un gène, c’est sa traduction en protéine : un gène donné induit la production d’une protéine donnée, il code pour une protéine - protéine : suite d’acides aminés (20 différents) - le système de correspondance entre la séquence en nucléotides du gène et la séquence en acides aminés de la protéine est le code génétique).

-> On verra aussi les nouvelles techniques agricoles en lien avec la transgénèse sur lesquelles doit statuer la Commission Européenne.
Nous dirons deux mots aussi sur la biologie de synthèse.

a . Les différentes nucléases :

L’insertion ciblée est rendue possible grâce à des outils que l’on appelle nucléases, ce sont des enzymes (= molécules, protéines qui permettent toutes les réactions biologiques) contenues dans le noyau des cellules.
Connues depuis 1965, les nucléases s’appelaient enzymes de restriction, découvertes chez certaines bactéries, ces enzymes naturelles (qu’elles utilisaient pour lutter contre les virus) sont des ciseaux à ADN. Elles reconnaissent une suite, une séquence de quelques nucléotides de l’ADN et coupent à cet endroit. Elles peuvent couper en de nombreux sites non spécifiques d’un gène.

· En 1990, on découvre les méganucléases : naturelles (dans beaucoup d’organismes) de grande taille et qui reconnaissent et ne coupent qu’ 1 seul site dans le génome. On dispose de plusieurs centaines de ces enzymes, ce qui permet de couper à pas mal d’endroits mais pas à tous : pour les biotechniciens cela ne suffit pas : on se met alors à faire muter et/ou à découper ces méganucléases et à recombiner les morceaux ce qui fait que maintenant on peut cibler n’importe quel gène dans n’importe quel génome.
Parenthèse : Inventeur : Cellectis (entreprise française leader dans le domaine d’ingénierie du génome et partenaire de GÉNIUS) et Institut Pasteur (au départ pour soigner des cancers et maintenant pour fabriquer de nouvelles molécules : huiles alimentaires, industrielles et biocarburants ...!). GÉNIUS utilise cette technique des méganucléases.
Risques :
- le risque de coupure ailleurs dans le génôme n’est pas zéro ...
- en général on introduit dans les cellules hôte un transgène qui code pour l’enzyme ! On ne sait ce peut devenir ce gène : muter, être à l’origine d’une autre enzyme qui peut couper ailleurs dans le génome ? Aie, aie.
D’après les scientifiques, ces méganucléases sont efficaces et spécifiques. Leur vectorisation (mode d’entrée dans la cellule) est bonne. Seul problème : les méganucléases recombinées, c’est complexe, long à faire et donc coûteux.
C’est pourquoi sans les abandonner, on construit d’autres nucléases : artificielles, synthétiques : en doigts de zinc, les TALENs, et dernier né le complexe CRISPR - Cas 9. Ils se fixent et coupent en un site spécifique sur l’ADN, c’est à dire en un seul site.
Ces enzymes permettent donc d’ajouter, supprimer, remplacer ou modifier des gènes.
Ce ne sont que des outils. Outils qui ne sont pas sans risques.

· Les nucléases à doigts de zinc : on introduit dans les cellules végétales un transgène de l’enzyme : mêmes risques que pour les méganucléases et en plus certaines de ces nucléases à doigts de zinc sont sensibles à l’environnement et coupent ailleurs qu’au niveau du gène où on veut intervenir (coupures parasites !), elles sont toxiques.
D’après les scientifiques, les nucléases à doigt de zinc sont de conception complexe, leur activité et spécificité sont bonnes et leur vectorisation est complexe.

· Les TALENs : on introduit dans les cellules soit un plasmide bactérien (bout d’ADN circulaire) contenant le gène qui code pour l’enzyme soit de l’ARN messager (l’ARNm est comme l’ADN une suite de nucléotides mais la molécule est plus petite et simple brin : c’est un copie du gène qui sort du noyau de la cellule et qui va permettre la synthèse de la protéine correspondante).
Les TALENs sont utilisés dans le programme GÉNIUS.
Mêmes conséquences = mêmes risques.
D’après les scientifiques, leur conception est aisée, leur activité bonne, leur spécificité très bonne mais leur vectorisation est complexe.

· Le complexe CRISPR-Cas 9 : il est très à la mode car peu cher : GÉNIUS se met à l’utiliser, ce qui n’était pas prévu au départ !
- La partie CRISPR a été découverte chez les bactéries, puis génétiquement manipulée en laboratoire. On a construit alors un ARN dit ARN guide (de l’ARN mais n’ayant pas la même fonction que l’ARNm) qui est complémentaire du gène à cibler (une séquence CRISPR génétiquement modifiée). On utilise aussi une enzyme : Cas-9 découverte chez ces bactéries et qui permet au système de fonctionner.
- Le complexe CRISPR-Cas 9 d’après les scientifiques permettra de faire facilement de la thérapie génique, de résoudre les problèmes de résistance des plantes aux maladies, à la sécheresse ... Utilisable pour modifier 1 ou 2 gènes. Mais pour faire augmenter les rendements du blé par exemple, ce sera bien plus difficile vu que dans ce cas de très nombreux gènes interfèrent...
Les risques de coupures ailleurs que sur la cible existent.
On l’introduit dans les cellules végétales par la bactérie Agrobacterium.
D’après les scientifiques, cet outil est facile à concevoir, d’une activité et spécificité bonnes et en plus on peut facilement faire entrer le matériel modifié dans les cellules.

RQ  : on envisage d’utiliser aussi ces techniques pour les animaux. Ex : avec les TALENs pour faire fabriquer plus de muscles, avec Crispr-Cas 9 , les chinois voudraient soigner des maladies géniques et donc intervenir sur l’ADN d’embryons humains. Ce qui contrevient à la convention d’OVIEDO ratifiée par la France et 28 autres pays européens en 2011.

b - les biotechnologies végétales proposées suite à la coupure

- On laisse la cellule réparer son ADN ce qui peut faire des mutations aléatoires (1 à 2% des cas) ; Celles-ci peuvent être aussi provoquées par des agents mutagènes : produits chimiques ou rayonnements.
Remarque : elles sont maintenant accompagnées de la méthode appelée tilling qui consiste à repérer facilement les mutations sur un gène connu et ainsi de sélectionner les cellules mutées sans avoir à les cultiver postérieurement. (avant le tilling : on cultivait les cellules in vitro, elles donnaient des plantes et il fallait sélectionner celles qui avaient le caractère muté attendu sur plusieurs générations : travail long et coûteux).
Risques :
- choc mutagène (ex : pour le riz une mutation peut perturber 50 autres gènes)
- effets non intentionnels sur le fonctionnement cellulaire (plus que la transgénèse).

- On ajoute un gène complet : construction génétique : promoteur, gène d’intérêt, terminateur : c’est la transgénèse appelée ciblée.
Deux cas :
- le transgène provient d’une autre espèce : on obtient un OGM, (non contesté).
- il provient d’une même espèce ou d’une espèce sexuellement compatible : on est dans un cas de cisgenèse ou intragénèse et la commission européenne doit statuer sur ce cas : OGM ou pas.
Cisgenèse : Transfert de gènes intacts entre espèces sexuellement compatibles.
Intragenèse : transfert de séquences entre espèces sexuellement compatibles, les séquences pouvant être réarrangées.
Pour la cisgenèse : vu que cela aurait pu se produire dans la nature certains vont dire que c’est pas OGM !
Risques : insertions mal ciblées, effets non intentionnels ...(extinction d’autres gènes : ils ne s’expriment plus)
Methode utilisée pour :
- modifier la composition du grain, du fruit, de la plante chez : le blé, la pomme de terre, la vigne, la canne à sucre, l’herbe de pâturage, la fétuque des pré.
- obtenir une résistance à certains parasites : tavelure du pommier : essais aux champ, champignons pour la vigne et le fraisier : en expérimentation.

- On ajoute de petits bouts d’ADN (quelques dizaines de nucléotides) : des oligonucléotides synthétisés en labo et porteurs d’une mutation : il s’agit de la mutagénèse dirigée par oligonucléotides. (technique « gene editing »). Au bout de quelques multiplications des cellules ainsi transformées, les séquences d’oligonucléotides ne sont plus reconnaissables, la plante ainsi mutée ne se reconnaitra pas de la plante mutée naturellement et donc... les entreprises vont peser pour que ces plantes ne soient pas reconnues OGM !
Utilisation : Un Colza resistant aux herbicides de ce type est prêt et même cultivé aux US en 2015 par l’entreprise Cibus. Cibus cherche les avis européens : OGM ou pas... mais sur son site, cette entreprise dit qu ’elle ne fait pas d’ OGM !
- Autre utilisation : résistance à la sécheresse (maïs), au mildiou (pomme de terre.
Dans le domaine médical, cette méthode servira à corriger des maladies génétiques et bien sûr est mise en avant pour faire passer la technique dans les domaines agricoles et agroalimentaires.

c - les autres biotechnologies employées

· méthylation de l’ADN  : toutes les manipulations génétiques sont basées sur le fait que les gènes (composés d’ADN) déterminent les protéines qui déterminent les caractères et que le système de correspondance entre le gène et la protéine : le code génétique est le même pour l’immense majorité des êtres vivants. Ex : quand on met un gène de bactérie dans un maïs, il comprend le gène et l’exprime sous forme de protéines.
Oui mais ... il existe des choses qui font varier l’expression des gènes ! Depuis une vingtaine d’années, on découvre que ces mécanismes qui sont réversibles sont aussi héritables, ce qui remet en cause le fait que nous héritons tout de nos gènes. L’étude de ces phénomènes qui concernent l’environnement du gène est l’épigénétique.
Ex : chez les plantes et mammifères, des radicaux méthyle présents dans la cellule peuvent se fixer sur un gène ou son promoteur et ainsi modifier son expression voire l’empêcher.
En provoquant cette méthylation, on peut modifier, « améliorer » les plantes et sans toucher au gène (sa séquence) lui même. D’ un point de vue technique, pour déclencher cette méthylation, il faudra soit introduire un ARN correspondant au gène dont on veut modifier l’expression soit le gène qui code pour cet ARN. Donc retour à la case départ !

· L’interférence à ARN ou les ARN interférents : la commission européenne ne doit pas statuer dessus alors que cette technique se pratique depuis 20 ans, sans évaluation : la fameuse tomate américaine à murissement retardée (Calgene en 1994) abandonnée car pas bonne, mais pas que...
En gros : il s’agit de faire agir des petits ARN (20, 25 nucléotides), éphémères que l’on apelle interférents et qui existent dans tous les organismes. Ils empêchent certains gènes de s’exprimer (c.a.d de produire la protéine correspondante, ils « éteignent » le gène) en s’hybridant avec l’ARN messager. Par ce biais on peut modifier des plantes. (ça relève aussi de l’épigénétique).
Pour faire cela il faut introduire un transgène qui code pour ces ARN.
Cette technique est utilisée pour fabriquer des plantes :
- luttant contre des virus (Court-noué de la vigne, Sharka du prunier, abricotier) ou contre des insectes.
- produisant des substances à composition modifiée : ex soja Monsanto ou Pioneer : plus riche en acide oléique (la Commission Européenne doit donner son aval).
Des risques sont suspectés : et si l’ARN se trompe de cible et éteint un gène vital important ? Cependant, l’AESA minimise ces risques.
Et tout cela n’empêche pas les entreprises de déposer plétore de brevets.

d - Les techniques agricoles utilisant la transgénèse

· la greffe : avec soit porte greffe OGM soit le greffon OGM.
Ex : sur un porte greffe de vigne GM pour résister au virus du court-noué, on greffe un scion non GM.
L’organisme entier est-il GM ?
Methode utilisée pour vaincre les parasites et favoriser l’enracinage (poirier par ex).
Risques : chez le tabac, des travaux ont montré le passage des produits du transgène de la partie GM vers la partie non GM mais pas le passage du transgène. (Le HCB conseille d’incinerer les inflorescences au cas où les produits du transgène soient passés dans le greffon non GM.)
Pour le court noué : C. Vélot rappelle que la transgénèse effectuée (gène viral) facilite dans le porte greffe la recombinaison des virus. Ces virus recombinés peuvent être dangereux et envahir l’environnement !

· L’agro-infiltration : ce n’est plus de l’agriculture puisqu’il s’agit de faire produire des molécules pharmaceutiques (vaccins par exemple) ou industrielles (biocarburants) en plein champ.
Actuellement ce sont les microorganismes qui font cela mais la quantité de molécules produites est soi-disant trop faible d’où l’idée de les faire produire par les plantes. Le génome des plantes est complexe (et des maïs GM producteurs de lipase ont déjà été fauchés à Nonette !), d’où l’idée de faire rentrer dans des plantes une bactérie préalablement génétiquement modifiée : Agrobacterium tumefiens dépourvue de son caractère pathogène. On a modifié cette bactérie avec le gène d’intérêt (qui doit faire produire la molécule que l’on veut) associé à des séquences virales (réplicons) et de ce fait aucune intégration de la construction génétique dans le génome de la plante n’a lieu.
On baigne ou on asperge les feuilles avec une solution contenant les bactéries GM.
Comme l’agro-infiltation est pratiquée sur des organes non reproducteurs, le transgène n’est soi-disant pas transféré à la génération suivante.
Risque de dissémination des bactéries modifiées en plein champ lors de l’aspersion ? sont-elles persistantes ?
Plante GM ou non ?
Actuellement possible uniquement sur quelques types de plantes (feuilles de tabac coupées par exemple) en milieu confiné.

· L’amélioration inverse : on sait tous que si on resème les graines des hybrides F1, on restaure une diversité à la génération suivante, ce qui ne fait pas l’affaire des agriculteurs ni des sélectionneurs qui sont obligés de refaire les hybridations à chaque fois : c’est long et coûteux surtout avec les espèces autogames qu’il faut empécher de s’autoreproduire (castration du maïs, fusion cellulaire pour le colza). Comment garder ces F1 qui sont homogènes ?
L’idée est de mimer un phénomène naturel très rare : l’apoximie c’est à dire une méiose qui produit des gamètes (cellules sexuelles) identiques à la plante mère.
(méiose : division cellulaire, qui brasse les chromosomes et les gènes pendant la formation des gamètes (ovules ou spermatozoïdes) produisant de la diversité au sein des espèces).
D’où l’idée d’aller rechercher dans les gènes qui sont responsables de la méiose des mutations (3) et de les combiner entre elles pour obtenir des plantes identiques à leur parents. Les chercheurs sont arrivés au stade gamètes mais pas à la plante.
La méiose est une étape fondamentale puisque liée à la reproduction, la modifer n’est-ce pas pas prendre des risques non mesurés ? En particulier les effets non intentionnels.
Et cela va dans le sens de l’uniformatisation des plantes qui ne pourront plus s’adapter à des milieux différents.

e - la biologie de synthèse

Il s’agit grâce aux techniques de l’ingénieur et à la convergence des nanobiotechnologies et de l’informatique de reconstituer des machines autoreproductibles dits organismes vivants possédant des propriétés qui n’existent pas dans la nature.
Lien avec les OGM ? Il faut des « briques » pour construire ces machines vivantes : et ce ne peut être que des morceaux d’ADN naturels ou reconstitués en labo. On les appelle biobriques. Ensuite il faudra les assembler et les inserrer dans des organismes (bactéries , levures ...) et qu’ils s’expriment ... tout un programme, vu la complexité du vivant et son évolution au cours de 4 miliards d’années. Évolution dont voudraient s’affranchir ces apprentis sorciers.
Notons que des jeunes étudiants sont mobilisés par le Massachussets Institute of Technology (MIT) en lien avec l’institut Pasteur pour travailler sur ces biobriques et les collectionner ! Pour le moment : on ne produit rien avec ces biobriques.
Ce qui se fait par contre est dans la continuité des OGM : faire produire des molécules alimentaires, médicamenteuses ou alternatives au pétrole par des bactéries, levures, virus .... génétiquement modifiés pour des chaînes de réactions métaboliques.
Pour le moment le prix de revient est très élevé pour les biocarburants ainsi produits. Des médicaments sont par contre sur le marché.

2 - OGM ou pas ?

L’intérêt des entreprises est d’échapper à la réglementation OGM très contraignante et de déposer des brevets, donc de faire en sorte que les produits de ces techniques ne soient pas vus comme des OGM tout en gardant la possibilité de déposer des brevets sur ces techniques. Or la protection d’un brevet sur un procédé s’étend au produit obtenu par ce procédé et s’il y a culture aux générations successives : Bingo !

Pour le moment qu’en est -il de la réglementation des OGM ?
On est toujours sous le coup de l’article 2 de la directive 2001/18.
Est OGM : « Un organisme, à l’exception des êtres humains, dont le matériel génétique a été modifié d’une manière qui ne s’effectue pas naturellement par multiplication et/ou par recombinaison naturelle »
Mais on se rappelle que l’annexe 1B de cette directive dit : « Les techniques produisant des organismes à exclure du champ d’application si pas d’utilisation d’acide nucléique recombinant :
1 la mutagénèse ;
2 la fusion cellulaire (y compris la fusion de protoplastes) de cellules végétales d’organismes qui peuvent échanger du matériel génétique par des méthodes de sélection naturelle »
.

Les experts de la commission européenne doivent donc décortiquer pour chaque technique précédente si elle donne naissance à des OGM et si oui, s’ils entrent dans le champ d’application de la loi. Ce sont des scientifiques et ils ne sont pas d’accord entre eux d’où les retards accumulés et l’impatience des entreprises.

La question « utilise-t-on des acides nucléiques recombinants ? » est centrale.
L’ADN ou l’ARN recombinant c’est une construction génétique : des bouts d’ ADN ou ARN d’origines différentes recollés (on devrait dire recombinés).

Un autre problème apparaît aussi avec certaines biotechnologies : on ne retrouve pas forcément la trace de la technique OGM dans le plante obtenue. Est-elle pour autant non OGM ? Ce que demandent certains scientifiques.

Ainsi :
- est OGM non contesté
 :
les organismes issus de la transgénèse,
le Greffon GM ?

- OGM qui sont en discussion pour être exclus ou non du champ d’application car ayant ou pas d’acides nucléiques recombinants :
les organismes issus de la mutagénèse dirigée par oligonucléotides,
ceux issus de la cisgenèse
ceux issus de la méthylation de l’ADN

- OGM en discussion pour être définis comme OGM ou non :
plantes issues de l’agro-infiltration
plantes issues de l’amélioration inverse

3 - Pourquoi les Faucheurs volontaires remettent-ils en cause ces techniques ?

D’abord il apparaît que toutes ces nouvelles biotechnologies sont des manipulations génétiques qui ne s’effectuent pas ainsi dans la nature par reproduction ou recombinaison. Donc pour nous, les plantes issues de ces techniques sont toutes GM y compris celles issues de la mutagénèse aléatoire et de la fusion cellulaire.

· Dire que des modifications comme celles que l’on fait en labo auraient pu se produire dans la nature, c’est faire fi de l’évolution du vivant qui prend son temps pour « digérer » les innovations génétiques par la sélection naturelle mais aussi le hasard. Ce qui ne peut se faire en labo sur quelques générations et en milieu non naturel en utilisant des produits ou procédés non naturels, avec un nombre limité d’interférences. Dans les champs, les plantes génétiquement manipulées de l’agriculture industrielle vont introduire de façon rapide, en une génération des modifications perturbatrices de l’environnement.

· Le stress de ces manipulations provoque dans les cellules et organismes des effets non intentionnels heréditaires génétiques et épigénétiques. (Ex du riz) Donc on devrait appliquer le principe de précaution.

· Ces biotechnologies visent toutes dans le domaine agricole à produire des plantes « améliorées » : elles répondent aux besoins de l’agriculture industrielle : pour certaines encore résister aux herbicides, produire des insecticides, pour d’autres plantes elles sont GM pour résister aux virus ou champignons parfois non dangereux, et aux besoins de l’industrie alimentaire : changer la composition de certains grains ...

· Bref un modèle de développement que nous refusons.

· Les risques sanitaires ne sont pas évalués : on attend toujours les études à long terme et indépendantes.
Les risques environnementaux sont toujours présents pour les plantes issues de ces biotechnologies : diffusion de résistance, effets sur les microorganismes du sol, sur les insectes cibles et non cibles, effets sanitaires sur les consommateurs.

· Accapparement du vivant par les multinationales - brevetage et notamment sur les gènes natifs, traits natifs (aucune modification génétique).

· L’épigénétique devrait nous faire prendre en compte l’environnement dans le fonctionnement et l’évolution du génome et donc ouvrir la voie à des pratiques agricoles qui en tiennent compte comme celles préconisées par les Faucheurs depuis longtemps, or elle sert encore à transformer le vivant : un comble !

Conclusion : où nous mènent les biotechnologies ?

· En plus de dérégler le climat, d’épuiser la planète et de détruire le vivant nous nous sommes soumis à nos propres productions (pollutions) technologiques.

· L’explosion de leur puissance, l’accélération de leur développement, leur côté inévitable sans arrêt avancé, la sous-information les concernant privent totalement les citoyens du pouvoir de réflexion, d’évaluation et d’orientation nécessaire au libre choix d’un modèle de vie cohérent.

Nous ne voulons pas d’un monde dominé par les technologies sans humanité, d’une nature maitrisée et marchandisée. Nous savons encore penser et agir pour que jamais ce monde n’existe.

Annick Bossu

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