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Aucune illusion à se faire sur les résultats de la conférence de Paris. Mais utilisons la COP21 pour travailler à un vaste mouvement pour la justice climatique.

COP 21 - négociations climat : les explications de Maxime Combes sur ce qui est en train de se passer...

2 rendez-vous à St-Etienne : samedi 28 novembre pour un spectacle avec la cie Naje à l’Al de Tardy, dimanche 29 devant Tatou Juste. La préfecture vient d’interdire la marche et le rassemblement à Chateaucreux...

vendredi 6 novembre 2015

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Samedi 28 novembre aura lieu à l’Amicale Laïque de Tardy un spectacle "ça va chauffer" de la compagnie NAJE.

Dimanche 29 novembre, rendez-vous devant le salon Tatou Juste au Parc des Expositions (Plaine Achille) à 11h...
Dernière minute : au nom de l’Etat d’urgence, la Préfecture de la Loire interdit la marche de Tatou Juste à Chateaucreux et le rassemblement devant la gare... ça continue...  

Télécharger le tract pour le 29 novembre

Le gouvernement vient d’interdire la manifestation associative et citoyenne du samedi 12 décembre à Paris - ça sert à ça, aussi, l’état d’urgence - et toutes les autres mobilisations à Paris autour de la COP21.
Un "appel (pétition) pour le maintien des mobilisations citoyennes pour le climat" vient d’être lancé :
"Construisons un monde juste, durable et solidaire"
On peut le signer à :
https://alternatiba.eu/appel-pour-le-maintien-des-mobilisations-citoyennes-pour-le-climat/

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Les explications de Maxime Combes

Une centaine de personnes a participé jeudi soir à la conférence-débat à la fac de St-Etienne (voir)

Ci-dessous des notes sur la conférence de Maxime Combes, d’Attac...

Pour suivre les infos de Maxime Combes jour après jour sur son blog :
http://blogs.mediapart.fr/blog/maxime-combes

Lire absolument ce dernier article, du 30 octobre :
Quels enseignements tirer de l’étude de l’ONU en amont de la COP21 ?

Maxime Combes suit les négociations climat depuis 8 ans. Et celles pour la COP 21 de Paris depuis 2 ans.
Il faut savoir que :
1 - les négociations ont déjà commencé depuis longtemps. Une Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques a été adopté au sommet de la Terre à Rio en 1992. Le "Protocole de Kyoto", dont on parle souvent, et qui se termine en 2020, c’était en 1997...
2 - L’échec de Copenhague (Conférence de Copenhague en 2009 sur le climat) a ouvert une période de négociations qui va se clore à Paris.

Alors, "Paris sommet de la dernière chance"  ? Mais c’était déjà dit comme ça en 2009 à Copenhague.
Déjà il avait été dit que la Conférence de Bali en 2007 devait aboutir à un accord historique à Copenhague !...

Quelque chose d’important à savoir : depuis Copenhague s’est mise en place une autre façon de négocier sur le changement climatique. Différente de celle du protocole de Kyoto (1997).
A Kyoto avait été décidé un objectif global pour la réduction des gaz à effet de serre ("GES"). Et cet objectif global avait ensuite été réparti entre les pays développés. Pour la France, la réduction était de ... 0% !!...
Maintenant, la méthode est de demander à chaque pays des "contributions nationales volontaires" (INDC dans le jargon de l’ONU). Contributions non contraignantes, pour la période 2020-2025 ou 2020-2030. Pas de contrainte, c’est le principe du "Name and shame" : tu annonces ce que tu vas faire. Si tu ne le fais pas, honte à toi... (!!)
Pourquoi plus de contraintes ?... Parce qu’elles se sont révélées inopérantes. Le Canada par exemple, a rompu ses engagements pris à Kyoto. Et aucune punition, aucune sanction, il a continué son business, as usual...
Pour ce motif là, les objectifs des pays pour leur réduction des gaz à effet de serre ne sont pas contraignants...(!)

La COP 21 de Paris se prépare à avaliser un "crime climatique"

Vers quels engagements de réduction s’achemine-t-on à Paris, et donc quel objectif de limitation du réchauffement climatique ? Est-ce que c’est à la hauteur des enjeux ?

Un consensus plus ou moins scientifique a établi qu’il fallait absolument limiter le réchauffement climatique à 2° en 2100 sans quoi la situation deviendrait non maîtrisable. En fait ces 2° dont tout le monde parle n’ont plus trop de fondement scientifique. Aujourd’hui, les climatologues disent plutôt : 1,5°, au-dessus de quoi ce serait non maîtrisable (sachant que déjà l’augmentation est de 0,85° par rapport à la période pré-industrielle).
Or, en ajoutant les contributions nationales de réduction des GES en passe d’être annoncées à Paris, on est au-dessus des 3° de réchauffement climatique provoqué.

Dans cette situation, il serait normal que, dans le cadre d’une négociation, il y ait répartition de ce 1° de trop à réduire, en augmentant les objectifs de réduction des GES de chaque Etat. On s’attendrait à ce que la négociation porte là-dessus !
Pas du tout ! Il n’est pas question de cela dans la négociation de Paris ! Les contributions nationales ne seront pas revues à la hausse.
Alors certaines études tempèrent l’inquiétude en disant que ces contributions mèneraient seulement à 2,7° au lieu de 3°. Mais la certitude c’est qu’on serait très au-dessus des 2° considérés par les plus optimistes comme le seuil de la catastrophe...

Maxime Combes : "Que la conférence de Paris valide des contributions (de réduction des GES par les Etats) qui mènent à un réchauffement de plus de 3° est un crime climatique !... qui est en passe d’être accepté par les gouvernements, les Etats, et l’ONU !"

Comment justifier ça ? Le gouvernement français dit : oui, mais c’est la première fois qu’il y aura un accord. Même si pas bon, il pourra être amélioré ensuite... Sauf que là, le problème avec les gaz à effet de serre, c’est que tout retard est non rattrapable. Une fois émis, ils restent dans l’atmosphère pour de très longues périodes.

Voici les prévisions de l’ONU. Explications sur le site de Maxime Combes...

Mais alors, de quoi va discuter la Conférence de Paris ? Du cadre juridique qui va organiser la lutte contre le changement climatique après 2020...

Si la conférence de Paris ne discute pas de cet écart entre le réel et le nécessaire, et de comment le réduire, de quoi vont-ils discuter ? De la gouvernance de la lutte contre le changement climatique, du futur traité pour après 2020 (le protocole de Kyoto va jusqu’en 2020).
C’est qu’il y a des choses à modifier : au moment de Rio et de Kyoto la situation géopolitique n’était pas la même. La situation des "pays du Tiers-Monde" notamment. Aujourd’hui par exemple, la Chine est le 1er pays émetteur de GES. Par habitant, la Chine est maintenant au même niveau que les USA.
La négociation de Paris portera donc plus sur "le contenant" que sur "le contenu". Elle portera sur le cadre juridique qui va organiser la lutte contre le changement climatique après 2020.
Et du coup, pas d’effort particulier d’ici 2020, alors que les climatologues disent qu’il faut absolument atteindre le pic d’émission des GES avant 2020. Et pas en 2030-2040 comme on s’y achemine.

Dans la conférence de Paris, il n’y a donc quasiment rien sur les objectifs de réduction des GES d’ici 2020 !
Par exemple, l’Union Européenne a déjà atteint son objectif de réduction de 20% d’ici 2020, et refuse d’aller plus loin ! (alors que des voix demandent 40%).

Quelques exemples :
1 - La réduction de l’utilisation des énergies fossiles est prioritaire : elles provoquent 80% des GES ! Or le terme "énergies fossiles" n’est pas dans le texte de l’accord de Paris !! Il faudrait un moratoire pour le pétrole, le gaz, le charbon, les gaz de schistes. Or, rien ! C’est la même chose que refuser de réduire le feu sous une marmite qui déborde, en se contentant d’appuyer plus sur le couvercle...
2 - le développement des "énergies renouvelables" devrait être une priorité, notamment pour les pays du Sud. Le mot ne figure pas dans l’accord.
3 - il faudrait relocaliser les activités économiques, par exemple la production de nourriture, avec autre modèle agricole, le développement des circuits courts, etc... Ceci est antinomique avec la libéralisation du commerce et de l’investissement. Or il existe un texte - la convention cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques, qui stipule qu’il est interdit de toucher aux règles du commerce international, c’est-à-dire à la machine à réchauffer la planète.
Voir http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/IMG/pdf/CCNUCC_20100727.pdf

C’est l’article 3.5 qui stipule : "Il appartient aux Parties de travailler de concert à un système économique international qui soit porteur et ouvert (...) il convient d’éviter que les mesures prises pour lutter contre les changements climatiques, y compris les mesures unilatérales, constituent un moyen d’imposer des discriminations arbitraires ou injustifiables sur le plan du commerce international, ou des entraves déguisées à ce commerce".
En décodé : interdit de toucher à la machine à réchauffer la planète ! Alors même que le problème de fond est la globalisation économique et financière.
Voir le livre "Gouverner le climat", qui fait le bilan de 20 ans de négociations climatiques...

C’est pourquoi on ne peut qu’avoir des attentes limitées sur la COP21 de Paris.
Et donc, la question à se poser est plutôt : comment agir en sachant tout ça ?

Et nous, sachant cela, que pouvons-nous faire ?

D’abord, déconstruire tout ce discours qu’on va à nouveau nous servir sur "négociations de la dernière chance", "accord historique", etc... Ne pas se laisser attraper par le spectacle de la COP21, mais se mobiliser sur la base de nos revendications, de nos exigences concernant les politiques publiques à mettre en oeuvre, et au plan local aussi, mettre les "décideurs" au pied du mur. Exiger la mise en cohérence des actes avec les discours tenus. Exiger des décisions qui réduisent les gaz à effet de serre. Promouvoir des alternatives. Et, au fond, se servir de la COP21 comme caisse de résonance pour faire cela.
Il y a des atouts : par exemple, certaines batailles ont été victorieuses, comme l’interdiction de la fracturation hydraulique en France.

La question est donc de travailler à bloquer la machine à réchauffer la planète.

Maxime Combes a pointé quelques unes des actions possibles et/ou en cours.
Par exemple, bloquer tous ces "grands projets inutiles" comme l’aéroport de Notre Dame des Landes, l’autoroute A45...
Là, il a parlé des actions "blockadia" en cours aux USA et au Canada (1).

Et puis il y a toutes les constructions d’alternatives. cf les rendez-vous Alternatiba, les expériences d’agriculture urbaine, les circuits courts, ...

Un autre mouvement est celui pour le désinvestissement des énergies fossiles. Il faut changer d’angle de vue : la question n’est pas qu’on va manquer d’énergies fossiles. La question est qu’on à trop d’énergies fossiles par rapport à la crise climatique. Et qu’il est vital de laisser dans le sol 2/3 à 4/5ème des réserves connues, si on veut avoir une chance de rester en-dessous des 2° de réchauffement d’ici 2100.
Or par exemple le gouvernement français a donné... le 21 septembre 2015...3 permis d’exploration d’énergie fossile !
Il faut donc arrêter tout de suite d’investir dans de nouveaux gisements. C’est la bataille que mènent par exemple des étudiants US qui demandent à leurs universités d’investir dans des énergies renouvelables. Avec des succès : le fonds Rockfeller a décidé de désinvestir des énergies fossiles. Le fonds souverain norvégien a décidé de désinvestir du charbon. Quid du fonds de la mairie de Paris pour financer la retraite de ses cadres ?...

La bataille contre TAFTA.

Plusieurs remarques :
1 - la négociation TAFTA est notamment pour libéraliser totalement le secteur de l’énergie. En particulier, l’UE veut acheter du gaz et du pétrole aux USA et au Canada, moins cher.
2 - Ces accords contraignent toujours plus la capacité de transition écologique. Ex : ce qui vient de se passer dans l’Etat de l’Ontario au Canada. Un dispositif de soutien financier public en faveur des énergies renouvelables, avec soutien aux entreprises locales, avait été mis en place. Il a été attaqué par l’Union Européenne et le Japon. Et ils ont gagné, le soutien aux entreprises locales a été abandonné !

L’urgence est donc d’imposer STOP à la libéralisation du commerce et des investissements.
Il faut choisir entre la libéralisation du commerce et le climat. Et mettre en oeuvre des politiques de transition énergétique.
"TAFTA ou climat, il faut choisir !"

Et, en résumé, utilisons la COP21 pour travailler à un vaste mouvement pour la justice climatique.

Un moment de débat a eu lieu ensuite. Parmi les questions posées, celle-ci : et si on engageait la bataille pour que les producteurs maîtrisent les productions et les investissements ? (propositions portées par Réseau salariat). On y reviendra...

notes : Roger Dubien.

(1) Cf une interview de Naomi Klein par Sophie Chapelle dans Bastamag :

Vous évoquez aussi les nombreuses luttes locales pour le climat. Quel est ce « nouveau territoire » que vous nommez « Blockadia » ?

"C’est un type d’action contre le changement climatique. Ce « mouvement de résistance aux énergies fossiles » est né dans la lutte contre le pipeline Keystone XL aux États-Unis : un énorme oléoduc que l’entreprise TransCanada veut construire depuis les sables bitumineux de l’Alberta jusqu’au golfe du Mexique. Le pétrole des sables bitumineux est l’un des plus polluants. Quand la construction du pipeline a débuté, les opposants se sont enchaînés aux clôtures, sont montés dans les arbres, ont construit un camp, qu’ils ont appelé Blockadia. Ce terme a été repris partout où les gens se battent contre des projets d’extraction, contre une mine, un terminal d’exportation, la fracturation hydraulique. C’est un « espace » transnational (voir la cartographie) : les techniques audacieuses de Blockadia viennent de l’hémisphère sud. Le mouvement a pris naissance dans les années 1990 lors de la lutte victorieuse du peuple Ogoni au Nigeria pour chasser le géant pétrolier Shell de leur territoire.

Enregistrement audio en ligne sur le site CAC42 :
http://cac42.free.fr/Climat/