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Désobéissance civique

De l’huile de neem épandue à St-Chamond

lundi 31 mai 2010

Les marchands de pesticides arriveront-ils à empêcher les agriculteurs d’utiliser d’autres méthodes culturales ? Aujourd’hui il est possible sans aucun problème de bourrer des fruits de pesticides, mais ceux qui veulent produire des fruits en agriculture biologique en utilisant des préparations naturelles encourent le risque d’être traités comme des délinquants. C’est le cas par exemple avec l’huile de neem - ça se prononce comme “Nimes”, et c’est autant aimé des vendeurs de pesticides et d’engrais chimiques que le purin d’ortie.




Alors samedi 3 avril était organisé à St-Chamond, sur une pelouse devant la médiathèque, un épandage d’huile de neem, justement, à l’initiative de plusieurs organisations paysannes et de protection de l’environnement [Confédération Paysanne, ARDAB (Association Rhône-Loire pour le développement de l’Agriculture Biologique), ASPRO - PNPP (Association pour la promotion des produits naturels peu préoccupants), Les Amis de la Terre, Nature et Progrès (1)], et avec la participation d’élu-e-s. Car les collectivités territoriales, mairies notamment, sont elles aussi très concernées, par exemple pour tout ce qui est entretien des espaces verts et jardins publics.
A St-Chamond, avaient bien voulu participer à cette action le maire de la ville Philippe Kizirian et d’autres conseiller-e-s, et les conseillères régionales rhône-alpes Valérie Bonicalzi et Léla Bencharif qui ont empoigné le pulvérisateur et commis le délit, - car il s’agissait d’accomplir un acte de désobéissance civique -, en pulvérisant de l’huile de neem donc, produit non autorisé, dans un espace public, pour dénoncer l’absurdité de la situation.

L’huile de neem est utilisée depuis des siècles, en particulier en Asie et en Afrique, pour ses propriétés notamment insecticides et fongicides. Cette huile a cependant un grave défaut : elle n’est pas fabriquée ni vendue par Monsanto, Bayer, BASF et cie. Dans ces conditions, a-t-elle bien le droit de continuer à exister ? Est-il supportable que les paysans et les jardiniers puissent acheter demain - de plus en plus nombreux - des produits alternatifs aux pesticides ? Mais si de telles élucubrations se répandent, à qui vendre demain le roundup et le reste ? (2)
Les services officiels proches de l’agriculture industrielle sont incapables de faire respecter la séparation et le traçage des filières OGM et non OGM - Pourtant il y a du boulot pour quelqu’un de curieux, et les Faucheurs Volontaires viennent encore par exemple de découvrir qu’à Sète, chez Sea-Invest/Sogéma, du tourteau de soja OGM et des engrais chimiques sont stockés, en vrac, dans un même entrepôt... Il semble que des visites s’imposent ! - Mais non, ce sont les agriculteurs bios qui sont dans le collimateur, s’ils utilisent l’huile de neem et d’autres préparations naturelles qui ne disposent pas en France de la coûteuse “autorisation de mise sur le marché (AMM)”, bien que ces produits soient autorisés par le règlement européen de l’agriculture biologique et par les autres pays européens.

La situation a été exposée par Jean-Luc Juthier, arboriculteur bio dans le Pilat, Guy Kastler, du Réseau Semences Paysannes, Jean Sabeng, chargé de la question des pesticides à la Conf’ Paysanne, André Bouchut, secrétaire national de la Conf’, Philippe Kizirian, maire de St-Chamond...
Les personnes et associations mobilisées demandent donc l’adoption d’amendements à la loi Grenelle 2 affirmant que les PNPP (Préparations Naturelles Peu Préoccupantes) ne sont pas des pesticides, et permettant leur commercialisation et leur utilisation.









(1) Lire l’appel : Non à l’interdiction des alternatives aux pesticides

(2) Il faut savoir aussi que la multinationale de la chimie Grace & co a tenté de breveter les propriétés fongicides de l’huile de neem. Elle a déposé un brevet, mais celui-ci a été annulé suite à la mobilisation en Inde notamment contre ce qu’on appelle de la biopiraterie, annulation confirmée en 2005 par l’Office européen des Brevets. C’était la première fois qu’un brevet était rejeté en raison de la défense des connaissances et pratiques traditionnelles. Mais quand les multinationales ne peuvent pas breveter et encaisser les dividendes, que font-elles ? elles essaient de faire interdire !...

Contact : Jean-Luc Juthier
arboriculteur bio
juthierjlv@wanadoo.fr